Pendant 10 jours, nous avons suivi, je ne dirai pas deux saints, mais une dizaine de saints. Bien sûr, le but premier de notre pèlerinage dont nous revenons, était de découvrir l’influence de Saint-Jean de la croix et de sainte Thérèse de d’Avila.
Mais leur époque fut féconde des soubresauts de l’Esprit Saint.
Le XVI° siècle a vécu des grandes luttes, de grands dérapages, par exemple la Réforme de Luther, et de grand rétablissements comme Le concile de Trente, la réforme des franciscains, la réforme des Carmes et des Carmélites.
Tout cela, porté par des hommes et des femmes de Dieu.
J’ai cité Saint-Jean de la Croix et Sainte Thérèse d’Avila, mais les mêmes terres on veut naître Saint Jean d’Avila, Saint-Pierre d’Alcantara, je pourrais ajouter Saint- Ignace de Loyola et d’autres.
Et derrière ces hommes et ces femmes, sommets de l’humanité, c’est le Christ que nous avons rejoint…. Que nous avons essayé de rejoindre.
Le Christ, à travers une spiritualité.
La spiritualité de la prière carmélitaine.
La prière, qui pour Sainte Thérèse, ” est un échange intime d’amitié où l’on s’entretient souvent, seul à seul, avec ce Dieu dont on se sait aimé(e).”
Nous avons rencontré le Christ.
1 – À travers des lieux qui ont été témoins de l’Esprit Saint.
La cathédrale d’Avila où Thérèse s’est réfugié lorsqu’elle avait 12 ans pour pleurer devant la Vierge Marie, la mort de sa maman.
Et c’est alors qu’elle prit la Vierge Marie comme seconde mère ou première maman… Devant une belle statue qui est revêtue, ces jours-ci, d’un grand manteau blanc.
Nous avons visité des lieux emblématiques : des couvents qui gardent intact non seulement des reliques, des pages écrites par Jean de la Croix ou Thérèse, mais aussi le sol, les murs, des chaises qui gardent dans leur mémoire silencieuse, les mots sublimes que s’échangeaient ces deux grands saints.
Des cellules d’une pauvreté extrême, comme en aucune prison nous pourrions en découvrir actuellement.
Cela nous fut une émouvante exploration dans le passé.
Nous avons touché à une époque qui explosait de contrastes.
Contrastes de la richesse, favorisée par la découverte de l’Amérique, et de la pauvreté, parfois extrême, comme le fut celle de la famille de Jean de la Croix.
Contraste de l’art, tellement productif, depuis des immenses cathédrales jusqu’à des tableaux innombrables ou des broderies confectionnées dans l’amour de Dieu par les mains des Carmélites.
Et nous avons compris que l’Esprit de Dieu trouve son terrain le plus favorable dans la pauvreté et le retour aux sources.
Thérèse et Jean ont tout fait à partir de rien.
Et Dieu a fait le reste, au milieu des combats, des doutes, de la nuit de l’esprit, du froid. Jean et Thérèse nous ont offert pour des siècles, et pour toute l’Église, les clés de la présence de Dieu dans notre vie.
Jean de la croix nous encourage à la vie intérieure, chemin de délices :
” dans cet état de contemplation… Dieu se réserve à lui seul l’œuvre à faire dans l’âme. L’âme peut alors se réjouir d’être dans un état de grande pauvreté, car si elle n’entrave pas l’œuvre infuse de Dieu en elle, elle recevra plus d’abondance et de paix, et l’Esprit d’amour allumera et embrasera en elle son désir et sa jouissance. ”
L’essentiel d’une vie.
Et le résultat c’est que les monastères de leur temps, ont poussé comme des champignons.
Les vocations ont afflué.
Quand on présente de l’essentiel à des âmes jeunes et pures, (et ambitieuses), elles savent reconnaître le chemin de l’engagement total pour la joie de leur cœur.
Nous sommes restés ébahis devant ce qui reste des efforts immenses de louange de Dieu dont témoigne l’architecture.
Mais aussi…
Nous avons rencontré le Christ à travers les messes et les offices que nous avons chantés chaque jour.
Nous avons communié au même Corps.
Et je vous dis… avec le groupe que nous formions, s’il n’y avait pas eu l’unité du Christ vécue par les sacrements, qui nous a permis de revenir ensemble…
je crois que nous serions revenus, chacun, dans un avion différent.
Mais nous avons rencontré le Christ aussi à travers l’enseignement d’un certain Père Thierry – qui a essayé de présenter un aspect – une porte – de la doctrine de Jean de la croix et de Thérèse d’Avila.
C’était pas gai, mais ça peut nous amuser pour le restant de notre vie.
Prière contemplative.
” le vrai bonheur de celui qui aime est de rendre à son Bien-aimé tout ce qu’il est, qu’il vaut, tout ce qu’il a, tout ce qu’il reçoit, et plus cela a de prix plus il goûte de joie à lui en faire hommage.
Telle est la joie qui remplit l’âme… Elle rend à son Bien-aimé amour pour amour. ”
Et le père Thierry a développé son propos en trois points
L’ascèse et la mortification, à faire froid dans le dos.
La prière contemplative à nous faire partir en extase…
Enfin l’Église et son trésor de sagesse.
” si l’affection, écrit Jean de la Croix, se porte vers quelque chose d’étranger à Dieu, elle s’embarrasse et se rétrécit, car tout ce qui n’est pas Dieu est étroit”
Nous avons des géants qui nous placent devant les horizons grands de nos cœurs.
Et comme le dit Sainte-Thérèse :
” au milieu d’une telle paix et d’un si profond silence, le Seigneur enrichit et instruit alors notre âme…”
Quand Dieu est là l’âme n’a rien à dire.
C’est un signe… : le silence est signe de la présence de Dieu.
« L’amour silencieux est le langage qui se fait le mieux entendre de notre grand Dieu ».
Et c’est ainsi que notre petite troupe de pauvres, a cheminé, avec des journées de silence, perdus dans une histoire intérieure et nos grands bâtiments où nous étions logés, qui pourraient, je crois, contenir 200 séminaristes,
Vous vous demandez peut-être ce que nous avons rapporté de ce pèlerinage ? Pour ma part, j’ai reçu une nouvelle leçon.
Tout d’abord que c’est Dieu qui fait tout, au-dessus de nous.
L’œuvre de notre prière nous n’y pouvons rien absolument.
C’est son œuvre à lui.
Et nos pauvres œuvres, nos vertus, si Dieu ne passe pas en elle, elle ne vaudront décidément rien.
Premier aspect;
Deuxième aspect : c’est le sentiment d’une vague amertume.
Devant tant d’immenses efforts, d’innombrables hommes et femmes, vivants en présence de Dieu, pour donner à notre monde un peu du vin nouveau de l’Évangile et de Jésus.
Nous sommes des nains, dans nos constructions et nos déconstructions dégénérées. Enfin troisième aspect que je rapporte de ce pèlerinage.
C’est l’espérance.
” entrer au-dedans de vous-même et travaillez à la présence de l’Epoux qui est toujours présent et qui vous aime” ( encore une parole de Jean de la Croix)
Et bien oui… Jean de la Croix ouvre le chemin.
Et son chemin le voici :
” Pour arriver à goûter tout, veillez à n’avoir goût pour rien.
C’est du génie. le génie de Jésus et de l’Esprit Saint.
Pour arriver à savoir tout, veillez à ne rien savoir de rien.
Pour arriver à posséder tout, veillez à ne posséder quoi que ce soit de rien.
Pour arriver à être tout, ( la voilà notre espérance !) veillez à n’être rien, en rien. ”
Notre espérance c’est que dans notre monde de riens, Dieu est passé et passe toujours, ruisselant de mille grâces. Jean de la Croix était aussi poète :
« En hâte, écrit-il, il traverse nos bois, Et dans sa course il les regarde.
Et son visage s’y imprime
Et cela suffit à les laisser revêtu de beauté. ”
Un petit regret cependant.
C’est notre mascotte que nous avions adoptée. Et qui est restée en son pays.
Un petit lapin, espagnol, qui a été plusieurs fois témoin de nos manœuvres et de nos errances avec nos minibus.
Un petit lapin qui écarquillait les yeux en se disant à chacun de nos passages :
” y sont fous ces Français !…
Ils viennent sur mon terrain de jeu et ils ne descendent même pas de leurs véhicules pour jouer avec moi.”
Il reste donc, une fois revenu dans notre pays pluvieux, que le Seigneur, par Jean de la croix et Thérèse d’Avila, a blessé notre cœur d’amour, et que nous devons maintenant Lui demander de le guérir par son amour.