Il a tué la haine, par sa chair crucifiée… En sa personne…’
Frères et sœurs,
On peut vivre notre foi, chrétienne, catholique, en deux modes.
Il y a le mode, ‘petit ruisseau’… Flop, flop..!
Des fois ça coule, des fois ça coule pas, ça dépend du temps, du terrain, on va à la messe, c’est déjà pas mal, et même que, des fois, on se confesse.
Bon…
Et puis il y a le mode ‘plongée dans l’océan’.
Là, il y a les marées, le bruit des rouleaux qui viennent du fond, qui emportent aussi le sable. Mais au loin au sonar, on capte une immense présence d’amour.
Ce n’est plus le monde des petits goujons ou des anguilles, c’est la rencontre des gros poissons, et parfois des requins ou des murènes,…
Je ne sais pas pourquoi j’ai toujours préféré le second mode de vivre sa foi. Vivre une vie spirituelle qui engage les profondeurs de l’âme.
J’ai l’impression de moins me moquer de Jésus-Christ.
« Il est venu annoncer la bonne nouvelle de la paix.. »
Mais pas une paix ‘glouglou-glou’.
Je veux une paix ‘océan’ (ou ‘océane’), acquise au prix du sacrifice de Jésus. Tellement de souffrances pour sauver nos âmes…
Alors, selon ce mode de vivre la vie spirituelle, il y a quelque équipement à prévoir. Il est vrai que chacun de nous a son chemin de découverte vraiment unique, sa relation intimement personnelle, selon la richesse créatrice de Dieu.
Mais il y a aussi quelques règles communes dans la découverte des grâces divines. Des règles permanentes de croissance dans la foi et l’amour de Dieu.
Les textes de ce dimanche nous en évoquent deux ou trois.
Je reprends quelques mots du cardinal Charles Journet qui pose bien le sujet… Voici ce qu’il écrit dans l’une de ses lettres :
» oui, c’est dans la nuit qu’il faut avancer, chacun.
Avec la certitude de l’infinie tendresse de l’Amour de Dieu pour chacun de nous, si misérables que nous soyons.
C’est lui seul qui peut, à travers des outils aussi infirmes, faire un peu de lumière pour les âmes’.
Voilà quelque chose qui rejoint le propos de ce jour…
La vie de foi est dans la nuit.
Et plus nous nous aventurerons dans la découverte de l’océan de la foi, plus nous goûterons aux ténèbres des profondeurs.
Ça a l’air un peu terrible.
Oui et non…
Oui pour notre orgueil.
Non pour notre cœur, qui communie alors à la tendresse de Dieu.
C’est le tarif pour accueillir la tendresse de Dieu :
Entrer dans la nuit de la foi.
La foi intègre toujours un côté où on n’y comprend rien, un côté mystère. Un côté dépassement de nos logiques et de nos ressentis.
Mais en même temps, une communication certaine de la tendresse de Dieu.
La foi ‘glouglou-glou’ n’a pas le retour tendresse.
La foi de l’océan a le risque de la noyade, mais elle a les flots du cœur immense de l’amour de Dieu.
Donc, première règle d’une vie de foi vraie :
Le courage de la nuit intérieure.
Parfois le brouillard, avec un goût de cendres.
Et une certitude cependant de la présence qui nous sauve.
Mais alors, si nous devons accepter d’être perdus, de vivre une certaine solitude avec Dieu, dans la nuit de la Rédemption du monde avec Jésus, comment s’en sortir, ou plutôt comment avancer vers la lumière qui se cache, en nous éblouissant ?
Et c’est la que nous rejoignons le thème de ce jour…
Le bon pasteur.
Et les pasteurs bons ou mauvais.
Quand on ne peut plus s’appuyer sur nos béquilles, il faut envisager la deuxième constante d’une vie de foi.
Trouver notre berger.
Je parle toujours de la foi ‘océan’. La foi ‘glouglou’, petit ruisseau n’a pas besoin de guide.
Le premier berger, c’est bien entendu Jésus. Sauveur. Il en faut un premier, indéfectible, définitif, jusqu’à la fin du monde.
Et voilà pourquoi Jérémie et l’évangile et saint Paul aussi, attachent tant d’importance aux pasteurs.
Parce qu’ils sont absolument nécessaires pour vivre la relation à Dieu et pour vivre l’Église.
Sans berger, il n’y a pas de peuple de Dieu.
On le voit dans la Bible, pour la période qu’on appelle des ‘Juges’, avant le roi David. Période de n’importe quoi et de décadence de la foi d’Israël.
Chacun fait sa cuisine ratée dans son coin.
La seconde règle d’une vie de foi, c’est l’unité du disciple à l’écoute d’un pasteur. S’il y a quelques exceptions dans l’histoire de la spiritualité, c’est pour montrer que Dieu est toujours libre de franchir les limites qu’il a posées..
Jésus est saisi de compassion devant ces pauvres qui courent pour le suivre et boire
ses paroles de lumière…
Parce que sans berger, l’homme de foi, la femme de foi, ne peut pas apaiser son cœur. C’est impossible.
Il reste toujours l’inquiétude de la nuit.
Il reste l’incertitude du choix et du chemin.
Il reste qu’on ne peut pas se porter seul.
Oui, Jésus est là.
Mais Jésus doit être révèle et garanti par l’Église et ses pasteurs.
Malheur à ceux qui croient se suffire ou pire, éloignent des pasteurs que l’Église propose.
Mais il y a une déviation très moderne aussi…
Elle n’est pas de vouloir se passer de pasteur, mais que tout le monde soit pasteur et berger !
Toutes les brebis revendiquent d’être pasteur à la place du pasteur… Le top du top, c’est d’être pasteur du pasteur ! Et là, plus de limites : on juge de tout, du pape, de l’Église, du curé, et même de la Bible et de Jésus Christ qui sont quand même très moyens et relatifs. ..!
Des pasteurs et des sacrements.
Troisième règle permanente de la vie de foi.
La fréquentation des sacrements (donnés d’ailleurs par les pasteurs)
Et je reprendrai le bon cardinal Journet pour évoquer les sacrements :
« Dans la nuit de l’humilité où Dieu nous demande d’entrer (encore cette fameuse nuit…), nous pouvons rencontrer la brûlure de son Amour.
Et combien profondément la tendresse qui le pousse à se donner à nous dans l’Eucharistie.
C’est comme à chaque fois une étreinte par laquelle il nous serre sur son cœur à la fois crucifié et glorifié. »
Je résume, pour ceux d’entre vous qui désire un cœur aux dimensions de la grâce du Saint Esprit :
La foi dans la nuit.
C’est la base.
L’amour de Dieu qui s’écoule dans le mystère d’une union de cœurs, le cœur de Dieu enveloppant de sa tendresse notre cœur.
L’humilité d’être accompagné par un pasteur vers l’unique berger qui est le Christ. Oui… Il reste à résoudre le choix de ce pasteur en Église. Je l’admets, c’est une vraie question qui mériterait une autre homélie…
Et enfin, accueillir Jésus par l’union à son Corps sacramentel, l’Eucharistie et le sacrement de réconciliation et les autres sacrements.
Et alors… L’océan devient votre ami.
Il vous promet le ciel plus infini encore que ses profondeurs sous-marines.