VINGT-QUATRIEME DIMANCHE ORDINAIRE A 2023
Le pardon
Frères et sœurs,
on ne peut pas s’aventurer à juger de la foi de quelqu’un.
Il existe tellement de variétés de chemins de foi, plus nombreux encore que les chemins des eaux souterraines.
Il y a des fois profondes ou de surface, qui peuvent s’étendre sur des kilomètres ou qui sont intenses au millimètre, des fois rigides ou amples, des fois monochrome et certaines d’une richesse harmonique géniale, des fois naines et d’autres explorant les galaxies.
Il y a la foi du clochard, cachée, de catégorie poids lourds et d’autres habillées en veston cravate, davantage dans le genre ballerine sur pointes…
Il existe la foi de dernière extrémité et la foi de persévérance héroïque…
Des fois cuites et recuites, et d’autres saignantes.
Notre Bon Dieu ne s’ennuie pas avec toutes ces merveilles.
Dieu ne s’ennuie pas, mais nous, on s’y perd et c’est belle humilité que de tout remettre cela dans la foi, à la bonté de Dieu.
Et cependant, pour juger d’une vie spirituelle, je pense qu’il y a une petite clairière. Le sentier de la foi nous échappe, mais on peut s’arrêter au milieu de cette forêt vierge dans une petite clairière, que l’on connaît tous, sur la carte.
C’est l’espace du pardon…
Parlons donc ‘pardon’…
Jésus pulvérise la comptabilité de Pierre.
7 fois….? 7, c’est déjà le chiffre de l’infini.
En bien non, pas 7 fois, mais 70 fois 7 fois…!
Autrement dit, » arrête de compter, Simon-Pierre. Tu n’as pas encore été blessé… » Parce que, quand nous sommes blessé d’un cœur qui pardonne, on ne peut plus compter. On devient incapable de compter..
Je dis : ‘ blessé d’un cœur compatissant’, parce que le pardon est le fruit de la blessure, d’une grave blessure intime, qui s’est réfugiée au creux d’une main de tendresse.
Ce n’est pas une règle théorique que je vous dis là, chers frères et sœurs, c’est une observation pratique.
Tous ceux que j’ai rencontrés, capables de pardon ‘du fond du cœur’ étaient des grands blessés de l’âme, qui avaient dépassé leurs limites, dont le moteur avait cramé, par un viol, une trahison, un crash minable, un écrasement ou une soumission honteuse au démon et à ses ruses.
Ou tout cela à la fois…
Saint Paul est un grand cramé.
Saint Pierre, les apôtres, tous les saints… Aussi..
Mais ça ne suffit pas.
Car j’ai vu aussi de nombreuses victimes qui restaient cambrées dans la révolte.
Je me rappelle de cette fille musulmane qui s’était détruit la vie, bien aidée certes par de bons serviteurs du démon, et qui criait de sa cellule d’isolement, en prison, « comment je peux me pardonner ? Comment je peux me pardonner ? »
Ou encore, ce jeune gars de parents inconnus, William, en foyer de la DASS à l’époque, où je travaillais, qui gémissait sur sa haine de tout, « personne ne m’aime vraiment… « . Et qui tombait de blessures en blessures, et qui accumulait, comme il disait, conneries sur conneries, plus ou moins graves.
Oui, pour pardonner ‘du fond du cœur’, (c’est Jésus qui le demande, ce ‘fond du cœur ‘) il faut s’être pardonné soi-même.
Avoir pleuré sur sa nullité.
Puis ensuite, s’être réconcilié avec elle.
Et pour cela, frères et sœurs, il n’y a qu’une seule porte. Une seule.
Personne ne peut pardonner à son ennemi qui lui a massacré la vie, s’il n’a pas passé cette porte.
Cette porte, elle est toujours, au fond du gouffre, dans les cendres fumantes, un amour d’une infinie tendresse.
Ce que je vous dis là, frères et sœurs, c’est impossible.
Il est impossible d’associer la faute et l’amour, à vue humaine.
Pourquoi ?
Parce que, pour quiconque, la faute nous rend laid ou laide.
Pire, la faute brise le miroir qui nous renvoie notre image, et elle nous crève les yeux. Inévitablement, la faute détruit ce qu’il y a d’aimable en nous.
Aussi bien la faute sur l’on produit nous même, que celle qui nous est infligée. L’ennemi, il est d’abord en nous, le loup qui hurle la haine on ne sait où, au fond de nous entrailles.
Et c’est pour cela que je ne parle pas aux prudents d’entre vous, ni aux hommes de calcul.
Les prudents et les logiciens ne peuvent pas comprendre et ne peuvent pas accéder aux sources du pardon.
C’est comme s’ils avaient un casque sur leur tête de peur d’entendre le hurlement de leur cœur..
Et puis, la blessure provoque aussi une réaction de protection prudente.
Pire que tout.
Piège supplémentaire du malin.
On ne veut plus prendre de risque, tellement la blessure a brisé la confiance en nous.
Alors, c’est à vous que je parle, qui êtes mort un jour (un jour dont vous vous souvenez comme de ce matin, où vous êtes mort dans un accident, la plupart du temps pourri d’une faute, de ce jour où vous avez fait un choix qui vous a dépassé par sa laideur. Personne, peut-être, a vu ce choix de ténèbres, mais à cet instant-là, votre âme est morte. )
Ce jour-là, précis, vous êtes morts du sabre de la faute. Vous avez failli.
Votre jugement à vrillé.
Votre volonté est tombée dans un traquenard.
Même si on vous y a bien poussé, c’est vous.
De tout ce que je dis il n’y a que la Vierge Marie qui fait exception.
Elle arrive par le même chemin que nous, mais dans l’autre sens : de la pureté absolue, à la Croix, et au pardon.
Impossible humainement de vivre la faute et le pardon.
Seul le Saint Esprit peut créer une alliance entre la mort clinique de la faute et l’expérience d’un amour qui re-propose une vie en supplément.
Ceux qui pardonnent sont tous en sursis de vie. Comme Lazare sorti du tombeau, réanimé, à la voix de Jésus.
Pierre a fait cette entrée en réanimation à l’instant de cette nuit où il est devenu traître à l’amitié divine, où le Christ flagellé, tuméfié, l’a regardé.
Pierre a pleuré de toutes ses larmes.
‘je ne le connais pas…’
Trois fois.
La dette incommensurable. Là, il touche le fond.
Et la réponse de Jésus qui avait été anticipée :
» quand tu seras revenu, affermis tes frères »
La mort dans l’âme d’un côté, et le gouffre d’amour de l’autre.
À partir de ce moment là, Pierre a vécu le sursis de la grâce du Christ. Dans le pardon profond et, ensuite, jusqu’à son martyre.
Qui y a-t-il de plus vital pour l’homme et la femme ?
Ce n’est pas la vertu…
Alors on pourrait dire : ‘l’amour’…
Ça, c’est une réponse d’enfants du caté dont certains savent qu’à toute question,
quand on répond ‘l’amour’, ça marche…
Oui l’amour, être aimé(e) est vital pour être soi même.
Mais il y a 40000 espèces d’amour, des plus nulles au meilleures.
Et il y en a une qui est le chef d’œuvre de Dieu, et du même coup le plus riche et le plus fondamental bonheur de l’homme et de la femme.
Dieu, notre Dieu – aucun autre -, notre Dieu de l’Église, de Jésus Christ, de l’Église catholique plus particulièrement, a inventé l’amour de pardon.
Ce n’est même pas qu’il l’a inventé, c’est dans son essence même, divine. Sa perle.
Et c’est le plus fondamental pour le cœur de l’homme.
Avoir été une fois pardonné, avoir été ressuscité d’une faute irrémédiable, d’une mort de son âme.
Ce qui fait la grandeur d’une personne, ce ne sont pas ses réussites et ses bonnes oeuvres, c’est la profondeur à laquelle est venu la chercher le pardon.
Celui qui pardonne, d’une disposition profonde de son cœur, pardonne toujours d’une action de grâce qui monte de la résurrection de son âme.
Et voilà, frères et sœurs, pourquoi j’aime Jésus…
Parce que, tout au long de l’Ancien Testament, on n’arrête pas de supplier Dieu de donner son pardon.
Et ce n’est jamais gagné.
Mais Jésus, c’est celui qui enveloppe de sa tendresse mon cœur blessé.
Dans la mesure où je lui ouvre mon cœur, il m’inonde de son pardon.
De son amour si dépouillé sur la Croix, qu’il va plus loin que toutes mes pauvretés. Jésus, seul Sauveur.
Et Jésus ne fait pas que remettre tel ou tel péché,
Il nous remet dans les bras du Père qui déborde de miséricorde.
Et il nous permet, par cet excès de pardon, de tout restaurer en nous.
Il nous permet de ressusciter…!
Il nous permet de poser notre regard dans le cœur de notre frère, de notre sœur abîmée, pour trouver sa source de résurrection.
J’admets que, souvent, il faut aller la chercher très loin, cette source…
Mais Jésus se trouve précisément aussi loin dans le cœur de notre frère, et dans le nôtre.
Il est toujours en train de payer notre dette.
… Si on lui permet d’atteindre notre cœur, nos dettes et nos blessures …
VINGT-TROISIEME DIMANCHE ORDINAIRE A 2023
Frères et sœurs,
» si deux ou trois d’entre vous demande n’importe quoi, Dieu les exaucera « . Comment parle Jésus ?
Jésus qui est la Parole…
Jésus parle en faisant descendre sa Vérité depuis les sommets jusqu’aux vallées. Comme les neiges éternelles quand elles sont près du ciel deviennent plus lourdes en bas des pentes.
Pour bien entrer dans la grâce de Jésus, la grâce de vérité, nous devons accueillir son message d’abord de sa présence, pour le vivre de la vie éternelle, jusqu’à la grâce qui enflamme notre désir de Dieu au fond de notre cœur.
Et tout devient lumineux.
» si deux ou trois d’entre vous s’accordent pour demander n’importe quoi, Dieu les exaucera ».
Attention…
Il y a quand même cette mention : ‘d’entre vous…’
Vous, ce sont les disciples.
C’est à eux que Jésus s’adresse –
Les douze, ses fidèles, qui ne pensent, voient, que par l’amitié à Jésus auquel ils ont donné leur cœur.
Alors vous voyez frères et sœurs,
Les paroles de Jésus deviennent plus lumineuses, plus simples même, si on se rapproche de son cœur qui bat de la lumière éternelle.
Il faut laisser Jésus parler, il faut l’écouter jusqu’à la pureté de sa parole, pour accueillir la clé qui permet de descendre jusqu’au détail…
Le sommet :
» quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux… »
C’est par là qu’il faut commencer, toujours commencer.
Le cœur des disciples, justement parce qu’ils sont « disciples », est tout donné à Jésus.
Il est inévitable alors, cela coule de source, que lorsque deux de ses disciples se mettent en prière sur n’importe quel sujet, ils demandent ce qui est précieux à Jésus.
Parce que, avant même de demander, ils pensent et respirent dans l’amour de Jésus.
Leur demande est inévitablement dans l’intention et dans la respiration de la grâce de Jésus.
Et alors…?
Je peux descendre du sommet…
Ce que ces deux-là auront lié ou délié correspondra inévitablement à ce que Dieu veut lier ou délier.
Puisque ce sera discerné dans l’amour de Dieu.
Et je suis le sentier de lumière…
2 ou 3, des disciples, qui sont dans l’amour de Jésus, qui demandent dans l’amour de Jésus, qui supplient dans l’amour de Jésus, que sont ils ?
Ils sont : l’Église.
Et l’Église, chers frères et sœurs, elle est toujours belle.
Même quand elle est salie par quelques pauvres malheureux, l’Église reste belle. Et de sa beauté, derrière les brumes des pauvres pécheurs qui lui font mal, l’Église propose, toujours, tous les jours, et partout, de la voûte étoilée jusqu’au recoin caché de notre cœur la lumière de Jésus…
L’Eglise propose le resplendissement de la joie de Dieu, de la joie de la vérité et de la charité.
Et vous voyez, personne ne peut prendre la place de l’Eglise. personne…
Parce que l’Église c’est Jésus qui parle à travers ses disciples fidèles, ses disciples amoureux.
Alors j’en arrive aux premières phrases de notre évangile d’aujourd’hui.
Vous voyez je suis descendu de la dernière phrase du texte, qui est la présence du cœur de Jésus, jusqu’à l’événement qui est mon frère dans l’erreur.
» Si ton frère a péché contre toi… »
Et maintenant nous pouvons résoudre cette phrase..
» Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul la seul. »
Il serait imprudent, téméraire, et même illusoire, de faire un reproche à son frère, si ce reproche n’était pas nourri de la parole de Jésus.
Pourquoi le disciple peut-il aller faire des reproches ?
Pour une seule raison.
C’est que quand notre frère a commis un péché contre nous, il a blessé l’Église. l’Église que nous aimons.
En fait, lui faire des reproches, ce n’est pas être justicier, c’est être un veilleur de l’Église et de la grâce de Dieu.
Quelle jolie et profonde expression du Prophète Ezekiel : » je fais de toi un guetteur »
Un guetteur, un interprète, un prophète.
Pourquoi je peux aller faire un reproche à mon frère ?Parce que ce reproche, il le vit déjà dans sa conscience, sous la lumière de l’Église. D’aller dire à mon frère qu’il a fait une faute, et quel que soit sa faute, c’est une faute contre moi, contre l’Église qui est en moi.
Hé bien, d’aller lui dire, à mon frère, s’est exprimer la tendresse de l’Église pour lui.
Jésus ne parle pas d’un redresseur de tort.
Jésus parle d’un guetteur, d’un prophète de la lumière de l’Église et donc de lui-même qui est tête de l’Église.
« Mon frère, tu as tort ».
» mon frère, tu te trompes « .
Cela veut dire :
» l’Église t’appelle à sa tendresse, et si je te dis que tu as tort, c’est parce que l’Église te propose son pardon, sa liberté, sa grandeur « .
Je ne suis qu’un interprète, mais quoique tu fasses, l’Église te rejoindra toujours de sa lumière.
Si tu l’acceptes, tu respireras la vie.
Si tu ne l’acceptes pas, c’est toi-même qui te coupes de la communauté et de l’amour de toi.
Frères et sœurs, nous comprenons alors pourquoi tant d’hommes et de femmes se tordent sur eux-mêmes pour fuir la lumière de l’Eglise qui illumine constamment les racines de leur conscience.
Nous comprenons pourquoi l’Église est la plus combattue au monde..
Parce que l’Église porte Jésus, parce que l’Église est toujours annoncée par des prophètes que nous sommes, si nous vivons en vérité et l’Église est notre vérité. Celui qui ne l’accepte pas veut faire taire sa conscience.
Œuvre désespérée des païens et des escrocs, des pervers.
Car le péché à ceci de particulier, qu’il aveugle et qu’il rend imperméable l’âme de celui qui est en faute.
Plus on est dans l’erreur du péché, plus on devient handicapé à accueillir la remarque de son frère et le retour à la paix et à la lumière.
La parole de Jésus dans son Église est comme une délicieuse mélodie qui caresse constamment les fibres de l’homme.
On peut essayer de crier, de faire du tapage, des fausses notes, mais inévitablement dans un recoin, au fond de notre cœur, la mélodie de Jésus et de son Église, de ses disciples, des cœurs qui sont unis au Sien, monte la musique qui fait le fond de la nature humaine.
Là où est l’Église là, notre conscience s’en trouve libre et heureuse. Là où est notre conscience, là l’Église chante sa mélodie.
Dans le monde, il n’y a pas de puissance plus grande que la force de la conscience. Il n’y a pas plus invulnérable qu’une conscience éclairée de la grâce.
» va trouver ton frère, et chante lui la mélodie de l’Église. »
Ce n’est pas toi qui va le lier ou le délier, c’est sa conscience elle-même qui va le libérer ou bien le rendre d’abord stérile, ensuite malade.
J’aime beaucoup cette petite phrase du Curé d’Ars, très simple :
» Le soleil ne se cache pas de peur d’incommoder les oiseaux de nuit « .
Sous le soleil de la grâce de Jésus, notre âme ne peut pas trouver d’ombre où se cacher.
» va trouver ton frère, et la lumière de l’Eglise inévitablement, si tu es d’Eglise, si tu es disciple, frôlera le mystère de sa conscience.
Tu auras été veilleur.
On ne te demande pas plus. »
Vous voyez jusqu’où descend la Parole de Jésus depuis ses sommets, purs, de vie éternelle…
« … et moi, je serai au milieu d’eux… » Joie de leur cœur.
VINGT-DEUXIEME DIMANCHE ORDINAIRE A 2023
« Passe derrière moi Satan ! »
C’est quand même fort…
Pierre veut éviter à Jésus l’épreuve.
Il a une bonne intention Simon-Pierre.
Et Jésus dit que c’est Satan qui parle par Pierre.
Là, frères et sœurs, nous sommes vraiment au nœud de notre religion.
Ou plutôt, au point de divergence de notre religion catholique et de l’esprit du monde. Or, derrière l’esprit du monde, il y en a un qui se cache…
Nous sommes à la croisée des chemins même pour des chrétiens, ou les uns prennent à droite, les autres prennent à gauche.
L’épreuve, avec les souffrances qu’elle implique, n’est pas acceptable pour le monde. À la limite on peut imaginer un petit effort, allez, on peut accepter un effort plus conséquent pour un bénéfice juteux.
Mais envisager de souffrir et même de mourir sans tenter d’échapper au massacre… Le monde ne comprend pas.
Il met cela sur le compte de la maladie mentale.
Et même, le monde va obliger à se soigner devant de tels symptômes.. ‘Prend tes cachets’.
Combien j’entends de braves gens, et même des chrétiens qui disent s’être éloignés de Dieu parce que dans leur vie ils ont eu une épreuve qu’ils n’ont pas digérée…
Dieu n’avait qu’à pas me donner cette épreuve…!
Donc, je me venge. Je ne crois plus en lui !
Si Dieu était pour moi, il n’aurait pas permis que je souffre tant.
Alors que quand on y regarde de plus près, nous nous fabriquons si souvent nos souffrances, avec méthode, nous les entretenons… la plupart du temps souffrances tissées d’affectif mal placé.
Ce n’est pas simplement vis a vis de Dieu que l’on se venge.
On se venge de notre incapacité à franchir un passage obligé qu’on n’accepte pas.
Pourquoi, cette erreur d’esprit ?
Frères et sœurs, il n’y a que le chrétien qui puisse comprendre.
Le chrétien, je dis, le disciple du Christ qui veut vivre de l’Évangile.
Le chrétien de nom et de cœur.
En fait, l’homme, la femme qui a compris que Dieu n’est pas le Dieu du confort. Pas plus que le Dieu de la réussite.
Dieu et la souffrance
Notre Dieu n’est pas le Dieu mafieux qui nous fait gagner à tous coups dans nos affaires et dans nos jeux.
Il n’est pas le Dieu qui va nous ‘protéger.
Nous protéger de quoi ?
De la perte de notre emploi ? De la maladie ?
De l’incompréhension de notre conjoint ou de sa mauvaise humeur ou d’une divergence d’appréciation ou de caractère ?
Il n’est pas le Dieu qui va rendre sages les enfants.
Même pendant la messe…
Il n’est pas le Dieu qui garantit le pouvoir.
» Passe derrière moi Satan ! »
Oui, le démon n’est pas loin de toutes ces conceptions qui n’ont rien à voir avec notre Sauveur Jésus Christ et son chemin de Rédemption.
Alors quel est notre Dieu, à nous chrétiens catholiques dans cette église ? Je proposerais deux approches :
Notre Dieu est le Dieu qui est là et nous aime.
C’est la seule certitude, qui ne garantit aucun succès, pourtant.
Deuxième approche, encore plus existentielle :
Les paroles de Jérémie dans la première lecture :
« tu m’as séduit, et je me suis laissé séduire ;
tu m’as saisi, et tu as réussi. »
Voilà notre Dieu, chers frères et sœurs !
C’est celui qui nous emporte le cœur.
Et après ?
Et bien après, on patauge…
On avance comme on peut, à travers nos pauvretés et celles des autres.
On avance à travers nos échecs et nos réussites, à travers nos souffrances et nos impossibilités, nos déserts et nos erreurs.
Et, inévitablement, à travers les obstacles et les persécutions.
Parce que si Dieu nous a saisi, c’est que la joie de la vie éternelle brûle notre coeur par monts et vallées et au delà des mers.
… Et au delà des gouffres.
» Je me suis laissé séduire… »
C’est tout ce qu’on peut faire.
Après se présentent les difficultés… : les purifications indispensables, les épreuves communes à tout le monde, et celles spécifiques aux amis de Dieu, en plus…
Parce que si Dieu nous a séduit, quand il frappe à la porte du cœur, il y a une clause dans l’invitation à la séduction :
Il va nous donner envie de participer au Salut du monde – ce Salut que le monde ne veut pas, bien qu’il le désire du fond de sa nature –
Cette participation, elle se fait sur les pas du Christ.
Voilà, chers frères et sœurs, le programme de notre vie chrétienne.
Tout commence en séduction intime, – une petite grâce de rien du tout qui nous frôle d’une plénitude de joie.
Mais attention ! Si on lui dit bonjour, elle nous emmènera à la vie éternelle…! Même si au départ on n’en voulait pas tant.
Quant au reste de notre vie, rien n’est garanti..!
Enfin… si : joie du cœur et épreuves imprévisibles.
Certains diront :
‘mais Dieu ne m’a pas séduit… Snif ! »
Deux solutions :
Vous êtes-vous arrêté cinq minutes dans votre vie ? Arrêtez-vous une demie journée pour l’écouter, lui qui patiente depuis 20, 40 ans.
Et découvrez l’obstacle au profond de vous. Bien souvent l’obstacle qui demande le pardon.
Autre solution : c’est qu’en fait vous êtes déjà séduit, séduite, et vous croyez que ça doit se faire autrement, dans des signes plus évidents que semble avoir votre voisin. Mais non… Allez donc le rencontrer dans la prière silencieuse et vous verrez que votre cœur ne demande qu’à brûler de grâces divines.
Mais, dans un autre sens, si vous ne vous laissez pas séduire, sachez que vous ne pourrez jamais dire franchement :
» arrière Satan ! »
» Je vous exhorte, frères, par la tendresse de Dieu,
à lui présenter votre corps – votre personne tout entière –, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu »
Voilà ce que dit saint Paul au cœur doux et humble…
Alors, frères et sœurs… Votre choix ?
La tendresse intime de Dieu, ou les acouphènes de Satan ?
DIXSEPTIEME DIMANCHE ORDINAIRE A 2023
Le roi Salomon est célèbre entre tous.
Nous avons aujourd’hui ce magnifique dialogue, en songe, entre le premier roi laïc et Dieu.
Pourquoi le premier roi laïc ?
Parce que Salomon sépare ce qui est religieux de ce qui est civil et politique.
En quelque sorte, il devance la très belle distinction laïque de Jésus :
» rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».
Quelle belle charte de gouvernement…! :
» donne-moi un cœur attentif pour qu’il sache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal »
Salomon pose là le fondement minimal, non pas des droits de l’homme, mais des droits de gouverner… (Les droits de l’homme c’est Moïse qui les avait déjà posés)
» un cœur attentif. Le discernement du bien et du mal « …
Il est vrai qu’il y a de la qualité dans cette demande.
Et Dieu le remarque :
» tu n’as pas demandé de longs jours, ni la richesse, ni la mort de tes ennemis »
Y aurait-il donc des politiques qui demandent cela ? …
La demande de Salomon est bien propre.
Bien propre et très laïque.
Parce que le laïque ce n’est pas ce qui n’a aucun rapport avec Dieu.
Le laïque c’est ce qui n’a pas le seul religieux comme objectif.
Fabriquer son pain n’a pas besoin directement de l’aide du Saint-Esprit et n’a pas pour objectif uniquement d’entrer dans la vie éternelle.
On peut faire du bon pain sans être un saint.
Fabriquer son pain ou diriger un pays c’est dans un ordre naturel des choses.
Mais c’est là frères et sœurs, que nous nous distinguons des athées et, à vrai dire, de beaucoup de chrétiens qui le matin sont chrétiens et le soir sont athées.
A la maison, ils sont un minimum chrétiens. Et au travail ils deviennent athées. Parfois des chrétiens qui deviennent chrétiens quand ils entrent dans une église et aussitôt ressortis ils deviennent athées.
Chrétiens avec les chrétiens – athées avec les athées … !! Double personnalité qui conduit au désastre !
Quelle est l’erreur de ces chrétiens qui dansent sur un pied, puis sur un autre ? C’est une erreur très répandue.
Qui abîme d’abord le cerveau pour virer au cancer de la vie de tous les jours.
Cette erreur c’est de penser que notre nature humaine peut se mettre à part de la grâce de Dieu.
Que nous pouvons nous suffire dans les affaires courantes, les relations avec la boulangère, mais aussi peu à peu dans notre prière.
On a notre vie… et Dieu est là pour nous aider de temps en temps.
Et pourquoi pas Dieu doit nous obéir …
‘J’ai demandé ça à Dieu… c’est pour mon bien. Donc cela l’oblige. Dieu doit me l’accorder.’ Gare à Lui s’il ne m’obéit pas !
Vous voyez jusqu’où mène l’erreur ?
Frères et sœurs, il n’y a que le chrétien qui prie qui peut éviter cette erreur.
En vérité, notre nature contient en elle, mais de façon irrémédiable, nécessaire, essentielle, et en continu, un appel à la vie de Dieu.
Un appel à la vie surnaturelle, à la vie éternelle, intégré en nous.
Qui n’est pas optionnel.
Notre nature ne s’achève que par la vie de la grâce de Dieu.
C’est très important.
Et donc, un laïc qui n’est pas chrétien ne peut comprendre complètement ni l’homme, ni l’âme, ni le bonheur pour lui ou pour les autres. Son jugement est faussé.
Parce que le bonheur de l’homme ne se trouve pas dans sa nature mais dans un appel qui dépasse sa nature.
Un homme, une femme, qui n’entend pas l’appel de Dieu en son cœur est obligatoirement handicapée pour parler du bonheur de l’homme et handicapée dans ses jugements.
Dieu est au-dessus de la nature de l’homme, mais la nature ne peut s’équilibrer et être en paix que si elle est hissée jusqu’à Dieu par la grâce.
Elle ne désire que ça. Être élevée par la main de Dieu.
Reprenons les images de Jésus.
Elles ont toutes un environnement très basique.
Un champ, l’océan pour la perle ou les poissons, du pain…
Un environnement basique qui est bousculé par un événement d’exception.
Un trésor ! au milieu du champ… Et le champ devient une merveille. Comme si presque un champ c’était fait pour cacher un trésor…
Une perle qui vient changer le quotidien.
Une pincée de levain, qui vient transformer tout le pain qui gonfle à nous faire saliver…
Une graine minuscule qui devient un arbre… qui deviendra une forêt et abritera tous les oiseaux du Ciel. Etc…
Vous voyez, il y a une exception qui modifie l’environnement dans lequel elle apparaît, et puis elle devient le plus important, l’élément vital… Elle prend la première place. C’est exactement ce qu’on appellera un jour le processus de l’évolution des espèces.
Sauf que la théorie de Darwin est enfouie dans une multitude de paramètres que plus aucun scientifique ne maîtrise.
Cependant Jésus a expliqué depuis longtemps la théorie de l’évolution… spirituelle. Et qui marche formidablement bien…!
Il y a la nature. Bonne ou abîmée. Riche ou pauvre.
La nature qui regarde le bout de son nez (ce sont les athées) et la nature qui regarde très au loin, l’horizon.
Et puis, de nos jours, il y a ceux aussi qui se mordent la queue en tournant en rond et qui disent qu’ils n’ont pas de nature. Ils ont le tournis dans leur tête.
Plus de genre, plus de nature, plus rien. Uniquement : ‘moi et ce que je ressens’…. Ca ne peut provoquer que le tournis…
Je regarde donc, seule issue, un homme complet qui veut vraiment son bonheur. Autrement dit un chrétien, homme de Dieu, homme de foi…
Allez je suppose que c’est vous !
Vous marchez dans la rue. Vous pensez au travail, santé, famille, distractions, etc… vous êtes normal.
Et puis en passant devant une banque, celle devant laquelle vous passez tous les jours, le banquier sort et vous dit :
« voilà, c’est vous !
Quoi c’est moi ? Qu’est-ce que j’ai fait ?
Et le directeur de la banque réplique :
« Voilà les clés de la banque. Elle est à vous ! Tout est à vous. Les coffres, les
comptes, les intérêts …
Comme ça !
Et d’un coup le monde change pour vous !
Tout change. Enfin ! vous allez pouvoir acheter la PS 5 pour votre fils. Et même réserver la PS 6 pour 2027 ! ouah…! bonheur !
Bon… C’est quoi ce banquier ?
… Hé bien, c’est la grâce de Dieu.
Un jour, vous faites votre journée… normale…
Quelques plaisirs, des efforts, des succès et des ratés.
Avec, cependant… l’oreille tendue vers une attente.
Le mieux, c’est l’oreille tendue pendant un moment, à genoux. L’oreille du cœur .. Et Dieu sort.
Il vous tend les clés de votre cœur et de son Cœur à lui.
Etilvousdit: «c’estàtoi…»
– quoiàmoi?
– Hé bien oui, tout… Mes trésors, tes désirs profonds, je te donne tout.
Tu ne savais pas que je t’aimais comme cela… !
Vous pouvez essayer de trouver votre bonheur dans tout ce que la nature, ou l’homme, propose.
Mais il restera toujours une frustration profonde, alors même que vous serez comblé de biens matériels, de santé, et même d’amours humains.
Pourquoi ?
Parce que notre bonheur ne se trouve que dans la banque.
Quand on vous donne les clés de la banque.
Notre bonheur ne se trouve que quand Dieu se donne, totalement, Lui-même.
Et c’est la seule demande qui vaille : « Seigneur, donne moi les clés de ton Cœur. »
Alors je reviens à Salomon… Qu’est-ce qu’il demande ?
Il demande de bien gouverner. C’est pas mal, bien sûr.
Et Dieu lui accorde. C’est pas mal quand on voit tous ceux qui gouvernent mal.
Mais Salomon ne demande pas de gouverner pour Dieu.
Salomon n’articule pas le pouvoir de gouverner à la béatitude de l’homme.
Il va faire une politique laïque sans tenir compte de l’Esprit Saint.
On pourrait dire de nos jours que le laïque qui n’entend pas l’Eglise comme lumière suprême de la grâce de Dieu, c’est la catastrophe à échéance.
C’est ce qui arrive à Salomon.
Il va déraper. Il va conduire son peuple au confort, à l’excellence de son Histoire. Mais avec le manque de la grâce de Dieu en sa trajectoire. Le manque de l’essentiel. Salomon ne déploie pas la politique vers un horizon divin, bien qu’il construira le second Temple, magnifique. Et il fera de belles choses.
Il va dévier. Et, par là, il va semer les graines de divisions qui éclateront, dès sa mort, à sa succession.
Salomon va vivre sur l’impulsion surnaturelle de son Père David.
Mais en Roi laïc qui perd la Foi au Dieu unique.
S’il avait gérer son Royaume pour Dieu, il aurait dépassé son père David.
Mais il a cru qu’on pouvait réussir par son propre jugement humain. Et il en avait….! Sans tenir compte de la primauté de Dieu.
Et ce fut la catastrophe…
Notre cœur, au travail, dans notre cuisine, en jouant aux boules, en regardant les informations, en élevant ses enfants, à l’école et à la Poste, réclame toujours d’être plus près de Dieu et de se nourrir de la grâce du Christ.
Si on le reconnait, Dieu nous donnera les clés du trésor de son Cœur.
Une onction de grâce nous ouvrira le Royaume des cieux.
Voilà les clés.
Et c’est trop, mais vous ne dites pas non !
Et votre journée bascule complètement, votre vie bascule complètement. Elle bascule dans la direction qui fait son bonheur.
Si on ne le reconnait pas, si on fait des parenthèses dans notre vie, des espaces sans Dieu, notre nature finira sur elle-même, notre politique tournera à vide, notre morale deviendra incohérente.
Et le trésor du Royaume de Cieux, notre paix, nous échappera.
On ne verra qu’un champ ingrat, broussailleux et des graines de colère.