Depuis Noël, nous avons vécu les premiers matins de l’histoire du salut.
Marie, Joseph, la famille proche, puis les bergers, le monde entier, tous s’éveillent à une intervention, inédite, de Dieu.
Aujourd’hui, c’est parti ! Jésus se met en route avec les hommes. Les hommes avec lui.
Dieu veut emmener par la main, avec une réponse libre, les hommes qu’il cherche pour une amitié. Son amitié qui doit rénover les cœurs et l’Humanité.
La beauté du soleil qui se lève au dessus des montagnes, elle n’est complète que si les petites fleurs de la plaine s’ouvrent à cette lumière, avec leurs nuances de couleurs.
Ce sont ces couleurs répandues en notre monde que nous pouvons favoriser ou éteindre, par notre réponse aux appels de Dieu.
Pierre, Jacques, Jean, Samuel, Isaïe, Saul, et la foule innombrables des saints de l’Église se sont levés à l’appel du Christ et ont ajouté leur couleur.
” Me voici “…
C’est à cette intersection, entre l’appel de Dieu et la réponse de l’homme, que deux mystères apparaissent.
– Le mystère de l’appel ou de la vocation, qui est déjà un miracle.
– et le mystère de la résistance à la conversion qui est demandée…
Dimanche prochain, je pense parler du mystère de lumière.
Ce matin, je voudrais effleurer, survoler le mystère de nos surdités et de nos fuites.
Mystère d’obscurité qui vient de l’homme. Les parades à la conversion qui nous est demandée.
Mettre à bas nos faux fuyants.
Les miens… les nôtres, et les leurs, à tous ceux qui se cachent….
Il est vrai qu’il y a tous nos frères qui ne viennent jamais à l’église.
La périphérie de la vie éternelle…
Dieu s’adressent à eux, par des appels personnels, pourtant. A tous.
Il y a une périphérie très lointaine, et une périphérie plus proche.
Avec toute la gamme de raisons qui recouvrent et provoquent le refus.
” ils se bouchent les oreilles comme des serpents qui refusent d’écouter la voix de l’enchanteur ” dit le Psaume 57.
Mais la périphérie, ne l’oublions pas, elle passe par notre cœur, frères et sœurs.
Certains sont engloutis par le mystère du mal. Chemins de perdition.
Ils se posent franchement en ennemis de la foi, de l’Église, et du Christ.
Dur d’oreilles mais surtout durs de cœur.
Tout en sachant que nous partageons le goût de ces ténèbres, dans les replis de nos âmes.
Je voudrais cependant davantage m’adresser aux bons chrétiens que nous sommes.
D’abord parce les autres ne sont pas là, (je pense…)
Et que l’appel à la conversion, il est pour nous, dans son urgence, dans cette église.
Comment devient-on sourd à la voix du Seigneur ?
La voix du Seigneur, c’est pourtant un appel à accueillir sa miséricorde. Un appel à guérir nos blessures.
Et je vois, tellement évident, un chemin, royal, large et accessible à tout le monde…
Tellement enveloppant et trompeur.
Celui de se donner aux sirènes du monde :
Le travail.
Les intérêts honnêtes ou malhonnêtes.
Le confort.
Les ambitions pour le bien et pour le meilleur.
C’est la forêt du petit Poucet.
La forêt n’est pas mauvaise en soi, mais on s’y perd.
La grande excuse est généralement : qu’y a t il de mal à travailler, à nourrir sa famille, à s’offrir un téléviseur ou un nouveau téléphone ? A vouloir davantage d’argent et d’assurance ? A s’informer, (jusqu’au dégoût), des sentiers boueux du monde ?
Il y a qu’on brouille la voix de Dieu qui nous appelle à avoir moins d’argent, plus de temps à la prière, plus de silence intérieur, plus d’intelligence et d’amour dans nos choix.
Et le chemin large nous détourne de la pureté et de notre vérité.
C’est une échappatoire, facile, dans notre environnement qui le favorise de toute ses forces.
Mais je passe à une autre nébuleuse de diversions.
Celle de la chair.
Diversions qui ne sont pas directement les débauches dont parle Saint Paul.
Mais qui brouillent notre écoute de la grâce divine.
Facile aussi:
Les appétits de la chair sont les plus sensibles, les plus enivrants.
Quand le cœur bat trop vite, nos oreilles se ferment, elles deviennent inaptes à la douce voix du Seigneur. Et notre jugement est pris dans un filet invisible. Il s’épaissit.
La chair, ce sont nos sentiments, c’est notre plaisir. C’est notre paix sensible.
Sables mouvants dans lesquels on s’enlise. Et dans lesquels surtout s’enlise notre jugement, notre regard sur les autres qui devient charnel, animal et impur.
Ça ne vire pas automatiquement à l’orgie.
Mais par la séduction de la chair, nous perdons la chasteté de notre esprit.
Jusqu’à modifier notre nature qui croit se suffire si facilement du plaisir :
On a faim, on mange. On a un petit manque, on se rassasie. Et s’il y a quelque chose qui vient nous gêner, on réagit par la violence.
Contraception artificielle, relations qui oublient la finalité de l’amour humain, de la fécondité de la vie et, bien sûr de la fécondité de Dieu.
Je rappelle, à cette occasion, frères et sœurs, que toutes ses recherches qui sacrifient la vie spirituelle au plaisir, premier servi, et qui sont contraires à la chasteté, sont des péchés qui éloignent du sacrement de la communion et ne nous permettent pas d’être en adéquation pour communier si on ne s’en est pas confessé.
Le degré au-dessus bien sûr, ce sont les addictions que le plaisir sensible engendre si naturellement :
Le champ lucratif de la pornographie qui fait dégringoler en dessous de l’animal.
La violence, la drogue, les jeux et les divertissements qui réduisent nos facultés les plus nobles. Notre intelligence et notre amour.
Impossible d’accueillir en ses conditions la grâce de Dieu.
À plus forte raison, un appel ou une invitation à la conversion.
Dieu est là, pourtant, le Christ frappe à la porte de notre cœur, pour simplement nous offrir de sa vraie joie, profonde…
Quels sont en nous les racines de ces appétits ? Chacun peut discerner pour soi.
Si vous ne vous êtes pas confesser, notamment et obligatoirement pour Noël, c’est que tout cela est vainqueur, au moins de manière tacite, en vous.
Est-ce que ces glissements sont les remparts ultimes de nos résistances ?
Eh bien non, frères et sœurs… il y a plus dangereux et plus imprégné de l’odeur du démon.
Car jusques-là, je parle de pécheurs, mais de victimes aussi, pour lesquelles il y a aura un temps pour les purifications, qui seront douloureuses.
Et qui ont déjà comme une maladie dans leur corps et dans leur âme.
Mais ce sont les faibles, des manipulés et ils le savent confusément, victimes, emportées dans les mâchoires de notre monde étourdi.
Toutes ces victimes, nous-mêmes, sur lesquelles nous devrions davantage pleurer.
Il existent tant de ces victimes, révoltées d’avoir ratées l’appel de la vraie vie et de leur mission sur terre, emportées par leurs addictions.
Qui sont cependant victimes, aussi. Dieu pardonnera, Dieu ira les chercher au profond de leurs erreurs. Dieu est bon.
Cependant, en profondeur de mal, il y a plus douloureux pour Dieu.
Pas dans les apparences, surtout pas dans les apparences.
Ce sont ceux qui détournent l’appel du Christ par mensonge.
Ils se mentent et ils mentent aux autres.
Vous ne les trouverez pas dans les ennemis visibles de l’Église, mais derrière le visage du frère. Du faux frère.
Nous avons en nous notre part du faux-frère.
Pas là où nous pleurons sur notre faiblesse… Mais là où nous nous croyons fort.
Le faux frère se croit ‘modèle’.
Il se croit représentant de l’Église. Parfois et souvent.
Et ne se croit pas invité à la conversion.
Il est gentil. Il est souriant tant qu’on ne lui parle pas de sa conversion.
On peut bien entendre et réentendre le chemin de la grâce, et ne pas comprendre.
Le comprendre de travers… les sages et les savants…
Il y a ceux qui entendent et ne veulent pas comprendre.
Il y a ceux qui ne comprennent pas, et qui savent tout.
On peut pratiquer. Mais en évitant le chemin de la conversion.
On reste dans la catégorie de ceux qui disent : ” Seigneur, Seigneur !”
Le discours est là, mais il sécrète les parades pour ne pas correspondre à l’appel.
Pour réduire cet appel. En fait, on fonctionne sur la réduction. Ça commence par «oui, mais…»
Depuis un siècle, l’Église se purifie des faux frères, disons, plus énergiquement qu’avant.
Depuis un siècle, des faux frères deviennent des frères ennemis parce qu’ils sont démasqués.
Et c’est tellement mieux pour un homme de foi, d’avoir un ennemi plutôt que d’avoir un faux frère.
Cependant, le père du mensonge sait se camoufler derrière des piétés, des dévotions, des actes humanitaires, des revendications de justice, des blessures qui apitoient.
Souvent, j’ai vu le diable pleurer.. Larmes de serpent qui semblent des sanglots immenses. Mais fausses.
Alors… Le faux frère… Sa tactique dominante…?
Je dis dominante, parce qu’il n’existe pas un faux frère parfait, absolu.
Ni un ennemi absolu.
Ni d’ailleurs un saint absolu, sinon la Vierge Marie, qui est justement le contraire de l’absolu.
Tout homme est un tissu qui se confectionne de plusieurs fils entrelacés.
Je pense que le faux frère sécrète inévitablement l’hypocrisie.
Il se dit, il se place, il s’indigne, il est à la place qu’il pense la meilleure, toujours, la plus honorable.
Mais intérieurement quel est son processus ?
Il manque de silence et il a besoin de reconnaissance, voilà ce qui trahit le faux frère sous son apparente humilité.
On le voit s’apaiser quand on parle de son excellence.
Cela serait à la limite plus drôle que fâcheux, quand on a repéré le faux semblant, derrière les discours, les dévotions, ses témoignages et ses conseils, sa charité très visible, mais l’œuvre de Dieu est abîmée en profondeur.
Parce qu’il réduit à sa conception l’infini de l’Esprit.
Tant de beaux chemins qui s’annonçaient et qui ne s’achèveront pas… en lui et autour de lui.
Voilà le plus triste.
Samuel, et les apôtres sont à l’appel de Dieu, la fraîcheur de la réponse à la conversion.
En fait, frères et sœurs, il y a un critère qui pose dans la lumière notre relation actuelle avec Dieu.
C’est la réponse à cette question :
” ma vie de foi, ma pratique, ma spiritualité, mes engagements, mes conceptions, est-ce que je les propose au discernement, de l’Eglise, ou est-ce que je les discerne par moi-même ? ” .
La réponse à cette question nous donnera la mesure, soit de la vérité de notre foi, de notre vie avec le Seigneur, de notre état tout simplement de chrétien.. ou bien de la fausseté qui tente de se cacher en nous ?
Dimanche prochain, je vous inviterai à ouvrir la porte de lumière.
Mais il fallait commencer par répondre à cette question pour ne pas partir sur un malentendu.