Christ Roi….
Cet appellation a une connotation politique.
Et pourquoi pas ?
Mais cela peut amener une confusion dans l’esprit des chrétiens.
Le Christ n’est pas un leader politique.
Le Christ est au dessus de toute politique.
Je veux dire par là que le Christ est au-delà de tout clivage politique, de tout développement historique d’ordre politique ou culturel.
Ça n’empêche que le Christ agit dans la société, dans la politique, mais indirectement, par le fait que les hommes qui composent la société et qui dirigent la politique peuvent avoir la foi et la vivre.
Le Christ a dit à ses disciples :
‘ vous n’êtes pas du monde, mais vous êtes dans le monde ‘.
Le premier, le Christ est ‘au-dessus’.
Le Christ a donc une influence sur notre société, qu’elle soit chrétienne ou anti-chrétienne.
C’est très important de respecter la priorité des choses.
La perfection supérieure de la grâce divine qui est dans le Christ, première, au-dessus du monde.
Pourquoi je dis tout ça ?
Parce que certains chrétiens ont dans leur tête l’ambition d’une révolution sociale chrétienne. Ou une révolution culturelle chrétienne.
Comme si c’était une nécessité, un but à atteindre.
Leur foi consiste pour eux à construire une société meilleure. A instaurer un ordre chrétien.
Bien sûr ce n’est pas mauvais en soi, mais c’est idéaliste. C’est une utopie !
Une bonne utopie, mais une utopie.
Que la foi construise une société harmonieuse, où tout le monde il serait beau tout le monde il serait gentil et charitable, c’est dans l’ordre du rêve.
C’est un jugement incomplet.
C’est un rêve qui a produit des désastres au cours de l’histoire.
Depuis l’Inquisition, en passant par une Église puissante et comme par hasard décadente, par des mouvements comme l’Action française au début du siècle dernier, condamnée par l’Eglise, ou encore par la théologie de la libération davantage usitée en Amérique latine… ou à l’opposé par un national-catholicisme plus proche de nous, ce rêve renaît continuellement de ses cendres, entretenu par de doux slogans comme :
‘ prions pour la France, pour qu’elle retrouve ses racines chrétiennes’
….. Bien sûr, mais pas si on veut que la France soit le territoire d’une religion officielle.
Ça n’a jamais été le propos du Christ ! nous ne le trouvons nulle part dans l’Évangile.
Le Christ n’est pas venu pour forger une culture chrétienne. Il ne le prône jamais un cadre politique. Et je dirais, cette conception est néfaste !
Quand Pilate demande à Jésus s’il est le roi des Juifs, Jésus répond : » c’est toi qui le dis »
Autrement dit, tu le dis avec tes paroles humaines. C’est peut-être vrai, mais c’est réducteur.
Quelques mois avant sa Passion, il est dit que « Jésus savait qu’ils allaient venir l’enlever pour faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira dans la montagne, lui seul. » [Jean 6,15]
Alors en fait….
Le Christ est venu changer les cœurs.
Le Christ est venu changer chaque cœur au fond de nous-même.
Il n’est pas venu faire une révolution sociale qui fixerait le monde dans une foi obligatoire, ou pire : conquérante.
C’est un rêve qui permet de ne pas avoir les yeux en face des trous.
Le Christ est venu mettre un feu. Et ça il le dit !
Et ce feu, il n’est pas social, il est au cœur de notre cœur.
C’est une rencontre qui peut bouleverser notre vie et ensuite irradier sur la vie de nos ami(e)s.
Ou même de nos ennemis.
Mais d’abord notre cœur doit être bouleversé par l’amour.
Le Christ est Roi parce qu’aucune réalité ne lui échappe.
Pas de l’extérieur, mais depuis l’intérieur il transfigure toute réalité de sa lumière, par sa présence. Il est là, et ça suffit !!
Il appelle toute réalité obscure ou mortelle à une résurrection.
À sa Résurrection.
La révolution que doit attendre un chrétien n’est pas une révolution politique ou une révolution sociale, culturelle, toutes ces révolutions ont été expérimentées et ont échoué.
La révolution que doit espérer un chrétien c’est une révolution spirituelle de son cœur, de chacun de nos cœurs; qui permettra le passage de la grâce divine, et le passage de l’inspiration de l’Esprit Saint, dans la pâte humaine.
La pâte humaine c’est à dire la politique, la science, l’éducation, la santé, la famille, la relation avec notre voisin, l’économie, et toutes les doctrines ou philosophies qui cherchent un bout de vérité.
Le chrétien n’est pas là pour faire une société chrétienne il est là pour rendre chrétienne la société parce que lui-même est chrétien.
C’est une nuance, fine mais très importante pour ne pas faire du massacre.
Quand une société est officiellement chrétienne elle vire inévitablement et très vite, au pharisaïsme, le pharisaïsme qui a tué Jésus.
Par contre, n’importe quelle société peut être transfigurée par d’innombrables petits éclats d’Esprit Saint.
Qui viennent d’où ?
Pas d’une loi, mais de notre cœur uni à Celui du Christ qui devient comme une étoile, qui peut être discrète, et pourtant super efficace dans la nuit du monde.
Ceci dit posé….
Je me tourne vers nous chrétiens, chacun de nous, dans cette église qui sommes de l’Église catholique romaine.
Notre foi nous oblige à avoir certaines attitudes sociales, familiales, à faire des choix en harmonie avec la grâce et la nature.
Ce sont les fondements sur lesquels Jésus-Christ a enfanté son Église. Notre belle Eglise.
Un chrétien ne peut pas faire n’importe quoi. Ni penser n’importe comment.
Dieu a fait les arbres qui poussent de la terre jusqu’au ciel; il a fait la mer qui bouge sous l’influence de la lune et qui retient ses eaux par ces rivages; il a fait le couple humain, homme et femme, capable de procréer un petit bébé, qui devient grand; il a fait les saisons, l’espace et les étoiles, il a fait l’intelligence de l’homme,
distribuant ses perfections selon un ordre et une nature magnifiques…
Eh bien…
Jésus-Christ, de la même façon, a fait son Église avec des perfections encore plus lumineuses à nous faire pleurer de bonheur.
Et parmi ces perfections, le Christ a institué les apôtres, avec Pierre comme pierre d’unité, et comme dépositaire des pouvoirs divins du Christ Roi.
Le Christ a donné une charpente à son Église, que sont les ministres institués, les évêques et les prêtres, et par là il a donné un sens politique à son Église.
Que l’on ne peut pas remettre en question sans trahir la pensée du Christ.
Et c’est ce qu’indique cette fête du Christ Roi, aussi.
Le Christ est tête de toute la communauté qui croit en lui.
C’est dans la nature, dans l’ADN de chaque baptisé au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit .
Il y a dans notre ADN de chrétien un appel à la communion à un seul Père, par un seul Fils de même divinité que le Père, dans un seul Esprit Saint.
Et cela a des retombées pour nos relations qui doivent être reçues de Jésus rendu visible sur terre par le Pape, les évêques et les prêtres qui sont dans la communion à notre Pape.
Et quand j’entends certaines critiques de chrétiens contre des décisions théologiques ou morales, ou même pastorales, qui viennent de Rome , de certains chrétiens qui pensent construire l’Église par eux-mêmes, parce que eux savent mieux que les autres ce qui convient à l’Église, je me dis qu’ils n’ont rien compris ni à Jésus-Christ, ni à l’Évangile, ni à la grâce de Dieu, et a fortiori à l’Église.
Ou bien ils ont compris et ils sont devenus des traîtres.
Ils ne peuvent pas aider le monde s’ils n’ont pas compris l’Église.
Ces chrétiens peuvent avoir des valeurs qui sont pourtant valables : ils peuvent se dépenser pour l’amour des pauvres, prôner la tolérance ou le partage, avoir une bonté visible et une apparence d’écoute qui les rendent séduisants …
Mais ils ne sont pas dans la Vérité du Christ.
Dieu donne sa grâce en abondance.
On doit le recevoir au profond de notre cœur.
L’amour fraternel et l’unité des cœurs doit être reçue par Jésus-Christ de la grâce divine.
Tout ce qui part de nous va en sens contraire de l’intention de Jésus-Christ.
Et d’une certaine façon tout jugement qui n’est pas reçu de l’Église, est un jugement incomplet et faux.
Cela, on peut l’appliquer aux chrétiens, et tout autant aux politiques, aux philosophes, psychologues ou éducateurs, aux parents, aux scientifiques, à tous ceux qui cherchent la lumière ou à tous ceux qui veulent répandre une lumière.
Pourquoi cette tendance chez certains chrétiens fervents, à remettre en question la nature de l’Église ?
Pour trois raisons.
D’abord…
Il existe certains tempéraments qui ont peu de facilité à être dociles. Tempéraments davantage rebelles, entreprenants, parfois créatifs, originaux, pleins d’énergie.
Et qui considèrent – c’est là leur erreur – que tout ce qui vient d’au-dessus d’eux les rabaisse et réduit leur liberté chérie.
Malheureusement, s’ils suivent leur tempérament, ils restent centrés sur eux-mêmes, ils ne peuvent pas respirer de la grâce de Dieu et comprendre les valeurs contemplatives ni même la vraie liberté intérieure qui se découvre dans l’obéissance.
Nécessité pour eux d’une conversion, ou mieux, de plusieurs conversions répétées, contre leur tendance naturelle.
La deuxième raison c’est une psychologie blessée qui a engendré des blocages.
Une incapacité à la confiance, une incapacité à admettre l’autorité.
Une vision déformée du père …
Une approche du péché et du pardon abîmée et douloureuse.
Toutes ces souffrances invisibles et intérieures nécessitent d’être guéries pour soigner leur jugement et atteindre l’amplitude d’un mouvement de foi profond.
Enfin troisième raison de ne pas reconnaître le Christ Roi et l’Eglise belle :
C’est le choix du mal, pour protéger son orgueil et son égoïsme.
Alors là, il ne reste que des purifications, des contritions, des pénitences, et peut-être même des exorcismes !
Ce qui rend plus complexe l’affaire c’est que ces trois raisons se conjuguent et se nourrissent bien souvent les unes des autres dans un même homme, et parfois… dans une même femme.
Le Christ est roi.
Il n’est pas roi du monde, parce que le monde touché par le péché originel poursuivra toujours sa route vers son destin.
Mais il est roi des cœurs et des intelligences.
Du cœur qui se tourne vers lui et qui reçoit de lui sa lumière.
Et alors, ainsi envisagé le Règne du Christ, le monde comprend, même si ça reste un peu flou pour lui, que s’il ne reçoit pas de l’Église, il passe à côté de son bonheur.
