DEUXIEME DIMANCHE DE PÂQUES – DIMANCHE DE LA MISERICORDE

À quoi se reconnaît Jésus ressuscité, quand il se présente ? que dit-il…?
 » la paix soit avec vous  »
Jésus est venu apporter la paix.
La paix du cœur.
La paix des cœurs blessés.
Par le pardon.
Quand je dis la paix du cœur, c’est la paix de tout notre être.
De notre affectif.
De notre tête.
De nos journées et de nos nuits.
La paix de nos angoisses.
De nos peurs.
De nos complexes et de nos blocages.
La paix de notre corps et de notre âme.

Aujourd’hui, c’est le dimanche de la miséricorde.
Qu’est-ce que ça veut dire ‘miséricorde’?
Ça veut dire que Dieu a choisi la miséricorde comme le remède pour nous donner la paix. On aurait pu l’appeler le dimanche de la paix.
Dieu veut que nous soyons en paix. En harmonie, tout simplement; en bonne santé.
Dès ici-bas.
Et dans une paix qui nous deviendra permanente et en plénitude quand nous serons près de lui, au Ciel.
Les mots que prononce le Christ après sa Résurrection, son message, consiste en ceci :
‘ reconnaissez-moi. c’est bien moi’
Et alors ? hé bien : ‘ soyez dans la paix ‘
Et alors ? Hé bien : ‘ dites-le ! annoncez cette nouvelle à toutes les nations ‘

Thérèse d’Avila encourageait ses filles en leur disant :
« La paix ! la paix !… c’est la parole sortie de la bouche du Divin Maître, et qu’il a tant de fois adressée à ses apôtres.
Mais croyez-m’en, si vous ne l’avez point, si vous ne tâchez pas de l’avoir en vous, vous travaillerez en vain à la chercher hors de vous. »
[chateau intérieur p355]
En fait, le signe le plus probant d’une relation d’amour avec notre grand Dieu, c’est une paix intime, la quiétude de l’esprit et de la volonté.

Et pourtant, c’est quand même étonnant, combien de chrétiens se complaisent dans le trouble et cultivent le trouble !
Il y a une sorte d’addiction au bruit, aux inquiétudes, au stress et aux affaires trépidantes; aux médisances.
On va dire : ‘c’est notre société’…
« Il faut bien se battre pour vivre. »
« se battre pour la justice, pour la vie, pour nos enfants. »
Mais en fait on se crée du stress et même on le recherche par une sorte de malin plaisir.
Et quand on n’en trouve pas on se fabrique des inquiétudes, on se fabrique des combats contre le vent.

Pourquoi y a-t-il si peu d’adorateurs ?
Pourquoi si peu de témoins de la foi en Jésus-Christ ressuscité ?
C’est très simple : Parce que la paix fait peur .
On va être de grands combattants de la morale ou de valeurs très belles, de valeurs chrétiennes..
On va défendre de belles causes : les pauvres, la veuve et l’orphelin, le Syrien, l’Ukrainien ou le Palestinien… Les femmes brimées et les enfants exploités.
Tant d’innombrables belles causes.
On va viser un meilleur équilibre du monde, de son écologie,
Ou même un meilleur équilibre de l’Eglise, de sa liturgie, de ses pasteurs, que sais-je ?
Mais si on n’a pas la paix de l’esprit et du cœur, la paix que Jésus ressuscité suscite au profond de nous, nous annonçons des idées et de beaux projets qui sont humains, nous développons des idéologies qui sont mêmes teintées catholiques.
En quoi sommes nous différents des païens ?
Si nous apportons nos combats dans les combats de notre monde, en quoi nous appelons la grâce sur nos frères ?
« le Seigneur le déclare : « Voici que je dirige vers elle la paix comme un fleuve et, comme un torrent qui déborde, la gloire des nations. »
Ce sont les Paroles d’Isaïe qui annoncent la paix du Christ et l’amour miséricordieux de notre Sauveur. [Is 66 12-15]

Parce que le salut que nous devons apporter aux nations, c’est notre paix.
En fait, non ! : c’est la paix du Christ…

Et si on se précipite dans toutes les nouvelles infos, les nouveaux combats, les questions qui durent 15 jours, les doutes entretenus par les médias, les émotions et l’annonce des malheurs qui se succèdent, nous ne pourrons jamais dire au Seigneur:
« parle ton serviteur veut écouter la paix de ton cœur divin»
On se fera des illusions d’être sauveur du monde …!
Et on sera de faux justiciers sous apparence de chrétien.

Le chemin préparé par le Christ et qui s’épanouit avec la Résurrection est une onde de choc de son silence d’amour.
Si on veut que le Saint-Esprit souffle en notre âme pour annoncer une grâce de guérison, nous devons nous détacher des affolements du monde, et des démangeaisons par le jeûne des infos et du virtuel et des inquiétudes.

Cette paix, l’homme ne la perdrait jamais, s’il savait mettre en oubli tout ce qui alimente ses émotions et son imagination.
Notre esprit est si fragile à se stabiliser..
Et combien de manques de charité éviterions-nous si nous savions rester en dehors des affaires qui ne nous regardent pas.

Je terminerai par les paroles d’un homme de paix qui écrivait :
« Quand le monde entier viendrait à s’effondrer, quand les événements les plus contraires nous accableraient de toutes parts, le trouble resterait aussi vain;
Il ne ferait même qu’ajouter au mal, au lieu d’y remédier.
Tout endurer dans la paix, avec égalité d’esprit, non seulement apporte à l’âme des biens sans nombre, mais aide, au milieu des adversités, à en juger sainement, à y donner même le remède le plus convenable. » fin de citation

Et qu’est-ce qui apparaît quand une âme goûte à cette paix ? :
La vérité de la Résurrection.
Nous comprenons la Résurrection et que nous sommes ressuscités avec le Christ quand nous goûtons à la paix du Sauveur de miséricorde.

HOMELIE JOUR DE PÂQUES

Vous savez, chers frères et sœurs, il y a des jours qui ne sont pas comme les autres.
Ou plutôt, il y a des instants qui ne sont pas comme les autres.
Il y a beaucoup de jours que l’on ne verra pas passer.
Des jours qui, dans 20 ans, existeront vaguement comme un wagon d’un train très long de notre vie.
Duquel vous souvenez-vous en 20 ans, des 6115 wagons qui sont passés de notre vie ?
Et puis il y a des jours qui sont comme illuminés par un instant.
Des jours ou une nuit.
‘Illuminés’ ça veut dire où notre sensibilité, notre intelligence, toutes nos perceptions, ont atteint une qualité exceptionnelle, une précision, un éveil qui va envoyer une onde, comme la vitesse de la lumière, sur toute notre vie, à venir et même qui va resplendir sur notre vie passée. La transformer.
Parfois, encore plus rare, la transfigurer !
Notre vie va garder la marque d’une intensité fulgurante.
Et généralement ça se traduit par un changement de vie, une conversion.
Mais pas toujours.
Ça peut être aussi un instant qui confirme un amour, une vérité, une amitié.
Ce petit matin de Pâques, de rien du tout, émergent d’une nuit au sommeil troublé… pour les apôtres.
Ce fut pour l’apôtre Jean, pour Marie-Madeleine bien sûr, et pour l’apôtre Pierre évidemment, l’un de ces instants fulgurants qui changent une vie.
La façon dont saint Jean écrit son récit du matin de la Résurrection, montre qu’il a été foudroyé par une compréhension supérieure qui a changé son existence.
Cinquante ans après cette expérience, 70 ans après cette expérience, Jean se souvient à la moindre virgule près, avec une force de détails de génie, comme un ouvrage de broderie réalisé par chaque coup d’aiguille, de chaque seconde, de chaque inspiration de ses poumons, de chacun de ces pas de course qu’il a posé sur le sol caillouteux.
C’est normal, Jean était un haut potentiel, un être hypersensible de l’amitié et de la grâce.
Tout son Évangile regorge d’une précision de détails extrêmement fins.
Mais là, au petit matin de Pâques, toute sa vie trouve sa consistance, se rassemble en un achèvement soudain.
Toute sa vie va être illuminée, irradiée, par cet instant où il se trouve devant un tombeau vide.
Ca nous fait frémir.
Parce que cette irradiation a été tellement puissante qu’elle va soulever l’Histoire du monde.
Nous vivons, chers frères et sœurs, sur l’intuition inouïe d’un homme – d’une femme et deux hommes – qui ont réalisé jusqu’au fond de leur être, que Jésus qui était mort… et ressuscité.
Que Jésus, qu’ils avaient perdu, vide abyssal dans leur âme, ce Jésus disparu dans une catastrophe d’échec et de souffrance, ce Jésus leur réapparaissait en une nouvelle vie de gloire, tellement inaccessible, tellement intense, tellement chargée de vie…
L’instant, où encore essoufflé, le cœur qui bat rapide :  » il vit et il crut « , c’est l’instant qui fonde toute la vie de Jean, et qui fonde la vie de l’Église jusqu’à l’éternité.
C’est l’instant qui ressuscite toute l’Histoire des hommes.
Sans ce témoignage de Marie-Madeleine, Pierre et Jean, de ces quelques disciples qui ont reconnu le Christ ressuscité, dans les heures qui suivent, et dans les jours qui suivent, nous serions dans une histoire de grisaille.
Wagons sur wagons.
Comme la plupart de tous ceux pas la foi.
Wagons sur wagons…
En ce petit matin de Pâques, il y a ceux qui se traînent, il y a ceux qui sont illuminés par l’intuition surnaturelle, fulgurante, de l’apôtre Jean.
En arrivant au tombeau, Jean vit et il crut.
En lisant ce récit où Jean ‘vit et crut’, ma vie change, ma vie est ressuscitée, je vois et je crois sur ces quatre mots de Jean.
Ma vie prend forme par cette révélation de l’existence divine de Jésus après sa mort.
Et vous pouvez bien m’aligner toutes vos observations ou vos contradictions logiques, je crois que Jean a vu et a cru.
Et je crois que Marie-Madeleine a vu le Christ ressuscité.
Quelle a vu le Christ vivant, et qu’il lui a dit :  » ne me touche pas « .
« Ne me touche plus »
Je crois que Pierre, Jean, Thomas, Philippe, Simon et Jude, Jacques et Nathanaël- Barthélemy, et tous les douze, et tous les premiers disciples, et Paul, et les deux braves sur le chemin d’Emmaüs, et ces hommes et ces femmes privilégiés des premiers instants de la première Eglise, je crois qu’ils ont vu le Christ ressuscité.
Et je n’ai besoin d’aucun autre support qui affaiblirait ma foi.
Ni vision, ni image, ni ange, ni voix ou révélation supplémentaire.
Parce que le Christ ressuscité a changé ma vie.
Et l’Église qui m’a transmis, depuis deux mille ans, ces quatre mots de Jean me nourrit d’un bonheur qui n’attend plus que la révélation parfaite et complète de la vision du Christ ressuscité.
D’une certaine façon, je n’attends plus que d’être ressuscité pour vivre en pleine compréhension du Christ ressuscité.
Jean a vu, porté par une foi puissante, son Bien-Aimé, vivant en Gloire.
Nous le verrons, sans la foi, en vision, le Même, en Gloire infinie, dans l’Eglise du Ciel.

Chers frères et sœurs,  « nous tous chrétiens, nous sommes passés par la mort, la mort de la grisaille, pour vivre maintenant cachés avec le Christ en Dieu.
Quand paraîtra le Christ, notre vie,
alors nous paraîtrons, avec lui dans la gloire. » [Col 3, 1-4]

HOMELIE NUIT DE PAQUES (Baptême et première communion de Léa)

Comment peut-on définir la résurrection ?
la résurrection, allez ! Je dirais… c’est une danse.
Il y a deux positions pour être à une soirée dansante.
Il y a celui qui regarde, assis, un verre à la main.
Et puis il y a le couple, ( généralement, on danse à deux…), partenaire contre partenaire, qui tourne, et qui se frôlent, et se projettent en avant puis en arrière, et se rejoignent, et se retiennent par une main, parfois par le bout des doigts.
Celui qui est assis, il ressent ce mouvement de va-et-vient, de tours et de détours, au rythme de la musique.
Il reçoit ce mouvement qui tourne dans sa tête.
Et puis il ressent aussi, inévitablement, sa solitude.

Tandis que le couple qui danse, justement, il se rit de la solitude.
Ce moment-là de toute façon, corps et âmes sont en communion, pour eux.
Je parle bien sûr des bons danseurs, pas de ceux qui se marchent sur les pieds !
Une communion qui promet…
Ils jouent le jeu de l’harmonie, légère, pour la promesse d’une harmonie plus profonde.

Hé bien la résurrection, ce n’est pas assis que nous pouvons la mesurer.
La Résurrection c’est quand on danse la danse de la grâce.
Il n’y a pas de discours de la Résurrection.
Il n’y a pas de mode d’emploi.
Il y a la danse, des corps.
Il y a la danse de la résurrection, la danse avec l’Esprit Saint.
La Résurrection c’est la danse avec l’Esprit Saint qui nous donne la présence qu’on ne peut pas attraper, du Sauveur dans sa gloire.
Ni attraper, ni tenir contre nous.
Avant sa Passion, Jésus était le fils de l’homme, dans l’humilité.
Grande humilité.
On peut le toucher et l’entendre.
Les foules l’écrasent même.
Mais à sa résurrection, il est le Sauveur lumineux…
Qui danse, mais avec notre âme.

Léa, tu es entrée dans cette danse avec Jésus.
Ce n’est pas ce soir, que tu as engagée cette danse, mais bien plutôt la première fois que tu es rentrée dans cette église.
Toute seule, tu es rentrée avec un désir.
Un désir qui ne venait pas de toi.
Et tu es ressortie de cette église en dansant avec quelqu’un…
Toi seule doit te rappeler ce pas de danse dans l’intime de ton cœur…
Peut-être pas même… C’était un pas tout timide. Tout discret.
Mais en cette nuit, le Christ, le Christ dans toute sa Gloire, celui que depuis des siècles le monde acclame comme vivant, ressuscité;
celui que depuis des siècles, l’Église embrasse comme son Epoux..
Le même, il vient t’inviter au milieu de la piste –  oui je sais tu n’aimes pas être au milieu de la piste aux étoiles, c’est tout à ton honneur – mais il vient t’inviter à finir cette danse invisible.
Et ce soir, c’est pour toute ta vie.
Pendant toute ta vie, tu vas pouvoir vivre d’une lumière qui donne la joie.
Tout ce que je peux désirer pour toi, c’est que tu ne t’assieds pas sur le bord de la piste, mais que tu veuilles devenir lumière avec celui qui est la lumière du monde.
Ce n’est pas pour une gloire d’étincelles.
Ce n’est pas pour faire la princesse.
Ton prince, c’est d’abord Jésus qui veut être la joie de ton cœur.
Laisse-toi emporter sur son chemin. Il est le Chemin.
Il est la danse.
La danse de la Vérité.
Il n’y a que la danse de la vérité qui comble le cœur d’un enfant, d’une jeune fille, d’une jeune femme, de n’importe quel homme de n’importe quel âge.
Le baptême, ton baptême, va te plonger dans la vérité qui est le Christ.
La vérité du Christ va te permettre de vivre ta vérité. Le plus pur de toi-même.
Et tout ce que je dis et qui s’applique pour ce moment de baptême, tu peux le comprendre pour toute ta vie aussi.
Ta vie devient chemin de vérité.
Pour toi, pour ton cœur, et pour les autres
Et tu lui dis… : ‘oui à la vérité’.
Mais en fait tu dis oui au Christ
et tu dis oui, tout simplement, à la joie de ta vie.
Et quand tu vas dire ‘amen’ au moment de ta première communion, c’est comme si tu disais devant tout le monde que tu veux le plus grand bonheur pour toi dans ta vie.
Tu deviens prophète.
Parce que dire ce qui fait notre bonheur, quand c’est un amour le plus profond, c’est être prophète.
Comme dit le Livre de l’Apocalypse : « le témoignage de Jésus c’est l’Esprit de prophétie. »
Parce qu’il n’y a pas de plus grand bonheur que de communier au Christ ressuscité.
De donner son cœur au Christ ressuscité, à chaque communion.
Rappelle-toi, un jour qui sera peut-être plus gris que les autres, que tu as commencé cette danse en cette nuit de Pâques, et que même si tu ne sais plus comment placer tes pieds pour danser, le Christ silencieux, peut-être invisible et pourtant lumineux, sera tout près de toi, fidèle, il gardera ta main dans la sienne, pour te guider, pour te relever, pour te donner un cœur grand aux dimensions de sa Résurrection.
Ne crois pas, Léa, que la vie chrétienne est un tapis roulant de facilité.
On ne danse pas sur un tapis roulant.
Ce serait plutôt une cage de boxe thaï.
Mais je sais que tu ne te fais pas d’illusions.
Le combat est rude, le Christ est passé par le combat.
Mais la victoire elle est aux dimensions de ta vie, aux dimensions de l’histoire même du monde.
Et surtout elle est aux dimensions de l’Église.
Tu verras beaucoup de petits hommes qui joueront avec l’écume de la vie.
Et qui essaieront de jouer avec l’écume de ta vie.
Et bien… à toi, aujourd’hui, dans cette nuit, il t’est proposé de jouer, de danser, avec les profondeurs de la grâce dans ton cœur.
Peu comprendront ton choix, mais qu’importe.
Notre personnalité, notre liberté, plus elles sont fortes et pures, moins elles sont comprises.
Le bon Dieu ne les a pas faites pour être comprises, mais il les a faites pour être ‘communiées’.

Dans la communion des saints, de toutes les âmes qui cherchent la lumière, dans la communion de toute l’Église, nous communions à la joie de ton cœur, ce soir.

HOMELIE VENDREDI SAINT

VENDREDI SAINT 2025
Je vais vous raconter frères et sœurs, le fondement de notre monde.
… Je suis désolé mais ce n’est pas une histoire drôle. C’est une histoire que l’on cache depuis l’origine du monde. En temps normal, on recherche la vérité. On recherche les éléments de vérité et de fausseté, dans l’histoire et dans nos histoires. Mais en temps de confusion, on ne recherche plus la vérité, on recherche le sauve qui peut. Le premier souci de l’homme avant même de trouver la vérité c’est de trouver le salut. De sauver sa peau, tout simplement. Dites à quelqu’un : « tu es foutu. pour quelques raisons que ce soit vous lui dites : tu n’as plus aucune chance de poursuivre ton existence. »
.Il se battra comme un animal pris au piège, jusqu’à la mort de son adversaire . Or dans les temps de confusion où l’on ne sait même plus où se trouve l’adversaire, Et ça je le répète c’est depuis le commencement du monde… Dans les temps de confusion il ne reste qu’une chose : On ne recherche qu’un bouc émissaire, une victime. La victime qui nous réconciliera même dans le mensonge et la décadence. Or c’est très simple, quand quelqu’un nous a déstabilisé par la vérité on va le
tuer par le mensonge. Par n’importe quoi d’ailleurs, mais le mensonge est l’arme du pauvre, et du lâche qui sommeille en chacun de nous. Il faut le transformer en victime. Ce quelqu’un ça peut-être un pays, ça peut-être un loup-garou imaginaire que l’on découvre chez le voisin, Le mieux c’est que ce soit une seule personne. Comme le dit Caïphe dans l’évangile. Une seule victime peut réconcilier notre conscience et peut calmer le peuple. Il n’y a plus vérité ou mensonge, il y a victime. Les fusibles de la nature humaine sautent quand la confusion a pris le dessus. Les fusibles c’est-à-dire la vérité et la justice.
Premier élément : la confusion. Deuxième élément, une déstabilisation :
Les pharisiens sont déstabilisés. Ils sont mal à l’aise. Tout le monde est mécontent. Aux pauvres et aux boiteux, les pharisiens ne donnent pas de solution à leur maladie. Les Romains occupent le pays et pressurent le petit peuple juif par des impôts et par une présence païenne . Tout le monde est mécontent. Il y a des révoltes sporadiques qui sont dangereuses pour tout le monde : pour les Romains, pour la hiérarchie officielle juive, pour les innocents qui en font les
frais. Et on va faire porter la dangerosité de ces révoltes sur Jésus. On va même jusqu’à l’identifier à un révolutionnaire dangereux. Les pharisiens vont se mettre du côté de Barabas, le brigand meurtrier. qui l’eut dit ? les honorables pharisiens se font alliés de Barabas… !
Les pharisiens vont se faire l’allié du pouvoir romain. Et pour eux, Jésus est un danger parce qu’il ridiculise leur autorité. Dans ces cas-là, lorsque nous sommes en danger nous cherchons une victime pour détourner le danger. Et la meilleure victime ce n’est pas celle qui est innocente ou pas innocente, c’est celle qui est inoffensive. Qui ne pourra pas répliquer. Ou tout simplement qui ne voudra pas répliquer. Jésus avait toutes les caractéristiques d’être la meilleure victime pour les pharisiens. Il y avait simplement un petit inconvénient mais qui n’était pas prévisible par les pharisiens : c’est qu’il était Dieu et qu’il allait ressusciter. Deuxième élément, la désignation d’une victime. 3e élément, la réconciliation avec l’ennemi dans le mensonge qui a tué la victime. Ce n’est pas une option c’est le fond de notre humanité touchée par le péché originel. La seule façon d’être en dehors de cette dialectique monstrueuse c’est d’être
la victime. Il y a deux sortes de victimes :
Il y a la victime qui subit et qui ne comprend pas même l’injustice qui lui tombe dessus. Il suffit qu’elle ait un petit bout de culpabilité. Et c’est sur cette blessure qui peut-être minime que vont s’acharner ces bourreaux. Et puis il y a la victime qui s’offre. La victime qui domine son bourreau. Qui le regarde dans les yeux. Et qui lui dit:« ce que tu as à faire fais-le vite ». Et qui ajoute : « convertis toi, parce que toi aussi tu es un enfant chéri du Père ». Dans son discours des Béatitudes, Jésus ne fera pas de différence entre victime soumise, inconsciente, et victime dominante. « bienheureux les persécutés. Bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice. bienheureux les pauvres. bienheureux les cœurs purs. Bienheureux ceux qui pleurent.»
L’homme retourne l’accusation qu’il a méritée C’est une généralité qui se propage depuis le meurtre de Abel par Caïn. Et même depuis le premier péché de Eve. La première parole de Adam c’est :
« c’est de sa faute. C’est elle qu’il faut châtier. »
La première parole de Eve :
« c’est de sa faute. c’est lui le serpent qu’il faut châtier ». La première parole de Adam et Eve après leur péché c’est pour désigner une victime expiratoire. En fin de compte, qu’importe l’immensité des péchés qui nous plombent la vie. Ce qui importe c’est de s’acharner sur une victime. Le sacrifice est le fond de l’amour. Le sacrifice est le fond de la justice. Le sacrifice et le fond de notre nature. S’il est vécu par amour, il nous grandit et il participe à la fécondité de Dieu. Il est promis à la résurrection et il nous divinise. Voilà aussi pourquoi on a tant de crainte au mot ‘sacrifice’ Parce que l’on sait qu’il nous attend à tous les coins de rue. Qu’il est inévitable. Qu’il est même salvateur. Voilà pourquoi personne n’a rien dit quand le Christ a été accusé et condamné. Parce que chacun préfère que la réconciliation soit sur le sacrifice de son voisin. Et là il n’y a plus à savoir si il est innocent ou pas. C’est lui qui doit être sacrifié un point c’est tout. Alors même que je l’ai suivi en ami pendant 3 ans, comme Pierre et les autres apôtres. Alors même qu’il m’a guéri. Alors même qu’il m’a donné de l’eau vive et la grâce à flot. Le Christ qui s’est présenté comme une victime parfaite, une fois pour toute l’éternité, cela suffit. Seigneur notre Dieu, prends pitié de nous pécheurs misérables. Jésus, Fils du Dieu vivant, victime nécessaire, pardonne-nous, pardonne nos immenses péchés. Nous vivons sur ton sacrifice et nous vivons par ton sacrifice.

HOMELIE JEUDI SAINT

Jésus est ressuscité.
C’est un fait.
Ça veut dire que la grâce est passée à travers toutes les absurdités accumulées du monde, depuis l’origine.
C’est un fait.
Qui donne une solution à tout le dysfonctionnement du monde.
C’est la seule merveille au monde.
Que la grâce soit passée à travers toute la souffrance et les dysfonctionnements du monde et l’absurde.
La grâce est passée.
Elle passe toujours.
Et elle est victoire.

Malgré tous les efforts des hommes nos frères, nous sommes toujours dans une situation de tour de Babel.
Depuis des millénaires les hommes se battent pour améliorer leur sort.
Pour développer leur confort et rendre leur vie plus facile.
Pour étendre leur puissance jusqu’aux étoiles.
(Ça peut les rassurer un peu…)
Et pour réduire leurs malheurs :
Réduire la souffrance.
La souffrance de la maladie.
La souffrance de l’affectif et de la solitude.
La souffrance des conflits.
La souffrance de l’incompréhension.
Et enfin les angoisses de la mort.
De toute mort d’ailleurs.

Or, l’homme se plante.
L’homme cultive le rêve qu’il fait des progrès.
La souffrance de la maladie ? Il n’y a jamais eu autant de malades.
La souffrance de l’affectif ?
Il n’y a jamais eu autant de blessures, de séparations, d’enfants meurtris par des parents qui manquent.
La souffrance des conflits ? :
Le rêve d’une paix universelle, c’est vraiment pour les naïfs.
La souffrance de l’incompréhension ?
Parlons-en… la prolifération des blogs, des ondes qui passent par les satellites, du gavage des informations, et des messages par Instagram, mettent en évidence la dèche, la misère de nos capacités de connaissance.
Quant à la mort, on ne veut plus l’affronter, on glisse dedans après s’être enivré de confusions.

Et ça, c’est depuis le début du monde.

Et puis est arrivé Jésus-Christ.
Qui a refusé toutes les illusions des hommes naïfs.
Des hommes naïfs bons et des hommes naïfs méchants.
Jésus-Christ a traversé la réalité du monde, pauvre de tous ses péchés.
Mais Jésus-Christ a traversé notre monde avec une lumière.
Une lumière différente, d’un autre monde.
Lumière du Royaume des Cieux.
Il n’a pas refusé la souffrance, il s’y est enfoncé.
Il n’a pas refusé le détachement affectif. Il l’a conseillé.
Il n’a pas refusé la pauvreté.
C’est à partir d’elle qu’il a ouvert de nouveaux fleuves de vie.
Quant aux conflits, il ne les a pas contournés.
Rappelez-vous : « je ne suis pas venu apporter la paix… mais le feu sur la terre »
Aucune domination ne l’a intéressé.
Aucun confort.
Aucune richesse.
Parce que Jésus-Christ à travers la pauvreté, la souffrance, et même à travers la mort a fait passer la grâce de Dieu.
Il n’y a que la grâce de Dieu qui nous suffit.
Tout le reste est trop empoisonné pour être récupérable.
Jésus-Christ a fait passer la grâce et le pardon.
Ou l’inverse, il a fait passer le pardon et la grâce.

Mais il reste un problème, une question…
Jésus-Christ est passé. Soit.
La grâce est passée. Soit.
Mais si elle ne passait pas, aujourd’hui, ce serait complètement vain pour nous.
On dirait :  « un jour, un homme est ressuscité. Il est passé à travers toutes les contingences de notre bas-monde. Quel beau souvenir ! »
Et alors… ?

Et ben, alors, il y a une merveille
C’est que je peux parler en fait au présent.
Jésus-Christ n’est pas passé, Jésus-Christ passe.
Aujourd’hui, comme hier.
Sinon, ce serait le désespoir.
Jésus-Christ passe aujourd’hui dans chaque messe, en sa plus forte présence.
Jésus-Christ nous met aujourd’hui les pieds dans le fleuve de sa grâce de vie.
Et comment ?
C’est le coup génial de Jésus :
En vivant sa victoire à chaque messe.
À chaque messe, Jésus passe à travers toutes les souffrances.
Il vit toutes ses souffrances.
Il passe à travers sa mort.
Et il se donne à nous dans un fleuve de lumière.
Se donne à nous parce qu’il est présent, vivant, qu’il peut toucher notre cœur et le vivifier, le réparer, le faire s’évanouir de bonheur.

Et le coup génial, c’est d’avoir inscrit son sacrifice et sa Résurrection, liés indissolublement, dans ce rite de la messe où l’on a l’impression de manger du pain alors que nous mangeons la vie éternelle.
Ça, c’est le coup génial.
Divin.
Et quand nous mangeons cette hostie, vivante de la vie du Christ, nous traversons ou plutôt la grâce nous traverse, la grâce vient traverser nos souffrances, nos conflits, nos incompréhensions, nos limites.

Le seul bonheur qui a sauvé le monde nous pouvons le participer.
Et c’est cet anniversaire de l’institution de l’Eucharistie qui fait exploser la victoire dans notre vie.
Par l’Eucharistie, qui est rien pour ceux qui n’ont pas la foi, nous ouvrons une minuscule porte par laquelle peut passer un océan de vie éternelle.
Et le reste nous le laissons au monde qui continue de s’amuser de façon dramatique dans ses illusions.

On attendait la grâce.
Disons… certains attendaient la grâce. Les prophètes, quelques hommes et femmes de Dieu.
La grâce est passée.
Et la grâce passe aujourd’hui dans cette église.
Et elle passera par le monde jusqu’à la fin du monde.
Parce que Jésus a dit un jour :
« ceci est mon corps livré, ceci est mon sang versé. »