Décidément, Simon Pierre n’a pas encore compris. Dans sa tête ça part dans tous les sens…
» non tu ne me laveras pas les pieds »
» si ! » répond Jésus..
» bon alors lave-moi tout entier !… »
» non ! » répond Jésus..
Pierre interprète le geste de Jésus comme un rite de purification.
Et Jésus lui dit ‘ c’est pas cela ‘
La purification elle se fait par l’esprit. par l’Esprit Saint.
Oui il en a besoin, mais c’est pas ce que Jésus veut signifier lorsqu’il lave les pieds de ses disciples.
Comment comprendre Jésus ?
Il est bizarre que l’Église donne comme geste exemplaire de Jésus, le jour de la première messe de Jésus – sa dernière aussi – en principal, le lavement des pieds.
Mais en fait, l’Église est géniale pour déployer le sens divin du message du Christ et de l’Évangile.
Pourquoi ?
Hé bien, parce que le lavement des pieds devient lumière lorsque nous participons à la messe.
Plus nous allons participer à la messe, avec tout notre cœur, tout notre être, plus nous allons comprendre le lavement des pieds des apôtres, la veille de la mort de Jésus. C’est peut-être pour cela que Simon-Pierre n’a pas compris au moment même le geste de son Sauveur.
Parce que Pierre n’avait pas encore célébré la messe…
À chaque messe, nous présentons au Seigneur, une petite offrande de pain et de vin. C’est déjà un sacrifice… – nous offrons quelque chose du fruit du travail des hommes, de notre travail.
Pauvre sacrifice…
Mais dans ce pauvre sacrifice, nous nous offrons nous-mêmes.
Dans toutes les religions, le mouvement fondamental est celui du sacrifice.
Et lorsque nous déposons le pain et le vin sur l’autel, nous ne valons pas plus que l’hindou qui brûle de l’encens devant ses dieux, où le musulman qui saigne le mouton. Parce que l’encens, le panier de fruits, le mouton, l’agneau, le pain ou le vin… tout cela n’est que pauvre offrande, sans valeur.
Et d’une certaine façon, tous ces sacrifices depuis l’origine de l’homme, portent la même signification :
L’homme donne une part de lui-même, et à travers ces signes se donne à Dieu, pour que Dieu lui soit favorable.
Très bien…
Le sacrifice est inscrit dans la nature de l’homme qui se place devant Dieu. Un homme qui ne sacrifie rien est une misère d’homme.
Il y aura un grand pas avec Abraham mais surtout avec Moïse, pour que ce sacrifice devienne le sacrifice à un Dieu qui est Sauveur.
Un Dieu qui nous parle.
Non seulement qui nous parle, mais qui vient agir dans notre histoire.
Et qui nous promet une histoire éternelle de bonheur.
Le mouton de la Pâque, pauvre bête, rôti au feu, parle à un Dieu qui aime l’homme et qui va tout faire pour récupérer l’homme qui s’est fait son malheur.
Mais je reviens à notre pain et à notre vin qui attendent là d’être posés sur l’autel. Nous allons nous mettre dans ses dons, nous allons mettre notre cœur devant Dieu.
» priez frères et sœurs, pour que mon sacrifice qui est aussi le vôtre soit agréable et Dieu le Père tout-puissant »
C’est nous-mêmes qui nous sacrifions, comme nous allons sacrifier ce pain et ce vin. Mais entre notre sacrifice et le sacrifice du pain et du vin ça reste vraiment très pauvre.
Nous offrir à Dieu, nous, pauvres pécheurs, vraiment ce n’est pas faire un cadeau à Dieu…!
Alors qu’est-ce qui va se passer pour que la messe devienne le sommet de notre vie ? C’est au moment de la consécration qu’il va y avoir un changement fabuleux de la valeur de notre sacrifice.
Après Abraham, après Moïse, Jésus va changer le sens de ce sacrifice.
Le Dieu à qui nous l’offrons est toujours le Dieu de Moïse, le Dieu sauveur.
De ce côté-là, rien ne change.
Mais du côté du sacrifice, du pain et du vin, c’est Jésus qui va donner sa valeur en venant habiter ce pauvre petit morceau de pain qui ne pèse rien, cette goutte de vin, raisin pressé de la grappe que n’a pas mangée le sanglier.
Jésus non seulement vient habiter, mais se faire pain et vin.
Absorber la substance du pain et du vin pour se faire lui-même, dans tout son être, sacrifice à Dieu.
Au moment de la Consécration, c’est le Christ qui meurt devant son Père, qui se donne devant nous au Père, qui est son Père et qui est notre Père.
Je n’ai pas perdu le fil de mon propos. Qui était le lavement des pieds.
Par le lavement des pieds, Jésus entre dans le même mouvement annonciateur de la messe, de son sacrifice.
D’abord le sacrifice sur la Croix, et ensuite son sacrifice sur chacun de nos autels, à chaque messe, depuis deux millénaires.
Jésus prend la position d’esclave devant ses apôtres, pour bien leur donner le sens de sa mort sur la croix.
Jésus se met au pied de son Église, pour redonner devant Dieu du plus bas de l’homme, la valeur la plus précieuse de l’homme, devant son Créateur.
Je ne sais pas si vous comprenez bien, frères et sœurs, ce mouvement d’amour du Christ.
Jésus se fait… rien : à genoux devant ses apôtres, serviteur sans valeur qui dépoussière les pieds avec un peu d’eau.
Jésus se fait ‘rien’ : condamné à mort au milieu de deux vauriens.
Jésus se fait ‘rien’ : quelques grammes de pain sans levain et de vin
Mais dans ce rien de pain et de vin, sur cette croix, abandonné de toute consolation, il existe.
Il est le Fils. Il est le Fils bien-aimé, chéri du Père de toute éternité.
Et là où se trouve le Fils, se trouve le Verbe. Le Verbe éternel.
Et là où se trouve le Verbe, le Père donne la grâce.
Le Père pardonne tout.
Le Père pardonne à Pierre lorsque Jésus touche les pieds de Pierre.
Le Père pardonne et donne sa grâce lorsqu’un pauvre misérable regarde Jésus sur la croix.
Le Père nous aime et nous prend dans sa tendresse quand nous communions au Corps de son Fils qui se fait manger par nous.
D’un sacrifice misérable, Jésus en fait l’acte d’amour éternel.
Au moment de la consécration du pain et du vin, nous sommes en présence intime avec le moment où Jésus s’abaisse jusqu’à la mort pour nous.
Et bien sûr la communion à sa divinité et à son humanité sacrifiée, nous emporte dans l’intimité de Dieu !
Parce que Jésus n’a jamais cessé d’être dans la gloire éternelle, uni au Père.
A la messe, simplement, il emporte l’Eglise, c’est-à-dire tous les pauvres croyants qui font un acte de foi en lui,
Il emporte l’Église dans une étreinte d’union d’amour éternelle.
Que voulez-vous…
Rien au monde n’est plus beau, ni plus intense de vie, ni plus rempli de joie que ce que nous offre l’Église catholique à chaque messe.
Nous offrons la Victime sacrée qui rattrape tous nos manques d’amour, pour les ouvrir à la béatitude que nous promet notre Dieu de pardon.
Nous sommes enfants aimés du Père par Jésus-Christ, le même qui était au pied de ses apôtres.
Et demain sur la Croix.
Et aujourd’hui, comme dimanche, ressuscité sous l’apparence du pain et du vin.