Sixième Dimanche – B – 2024

Principes et relativisme
Ce brave lépreux, il n’a pas tout compris.
Il a quand même vécu une aventure formidable.
Il guérit d’une maladie incurable et terrible.
Tout le reste alors, pour lui, s’évanouit derrière sa joie ! Presque normal.
Tout le reste, c’est quoi ?
C’est pourtant le plus important.
Le reste, c’est Jésus. Sa divinité. sa mission de salut.
Son sacrifice d’amour.
Le reste, c’est ce que lui demande Jésus aussi :
La Loi, la loi de Moïse, qu’il doit observer, et la discrétion.
En reconnaissance de sa guérison, ce lépreux aurait pu respecter ce que Jésus lui recommandait.
Le résultat c’est que sa jubilation a augmenté la difficulté de la mission de Jésus.
Ce lépreux n’a pas été jusqu’au bout. Il s’est arrêté à lui-même.
Ça veut dire que ce n’est pas parce qu’il nous arrive un bienfait, qui peut être un miracle même, ou une grâce, ou au contraire qu’il nous arrive un malheur, que nous devons oublier l’essentiel, plus grand encore.
Heureusement, l’Église veille à nous rappeler que ce n’est pas à partir de ce qui nous arrive en particulier que nous pouvons ériger des principes de conduite. Mais c’est l’inverse :
La morale ne se juge pas à partir du particulier.
Ni d’un cas particulier, ni de nombreux cas qui se ressembleraient.
Une morale qui s’établit à partir d’une jurisprudence est une morale qui va s’emmêler les pinceaux.
C’est malheureusement une erreur très commune de nos législations actuelles. Une morale saine se définit à partir de principes qui éclairent ensuite des cas particuliers.
En partant du particulier, l’esprit peut plier jusqu’aux erreurs les plus monumentales.
Comme le disait Léon Bloy : « si vous ne visez pas le cœur vous risquez d’atteindre en dessous de la ceinture »
Voici une parabole…
Au fond du jardin de Gaston, se trouvait depuis 3 ans une chaise cassée… Le voisin de Gaston, Hippolyte, n’avait juste qu’à tendre la main pour le débarrasser de cette chaise.
De plus Hippolyte est menuisier.
’Ce n’est pas voler son voisin, pense-t-il, que de le débarrasser d’un objet qui n’est même plus dans sa mémoire.
6° DIMANCHE – B – 2024

Il ne s’en aperçoit pas, donc c’est qu’il n’avait pas besoin de cette chaise.’
Le raisonnement est très pratique.
Ça ne fait de mal à personne et au contraire ça fait du bien à Hippolyte qui peut réparer la chaise et lui trouver facilement usage chez lui.
Dans la pratique, c’est justifié donc, et ça arrange tout le monde.
Hippolyte oublie les principes bien sûr. Puisque le principe dit qu’il ne faut pas voler. C’est tout.
Et en plus, le jardin de Gaston est plus propre.
Une nouvelle loi devrait être inscrite :
’À partir du moment où ça ne fait pas de mal à mon voisin, j’ai le droit de faire ce que je désire et qui m’est profitable.’
Hyppolite passe, dans sa tête du vol à une faute plus grande celle de croire que ce qu’il a volé, il a le droit de le voler.
Parce qu’il n’a pas fait de mal visible.
Les enfants utilisent souvent cet argument : ‘Je lui prends sa poupée parce qu’elle ne s’en sert pas…’
Huit jours après, notre brave Hippolyte à la porte de son garage, aperçoit Félicie, la femme de son voisin.
Il ne lui parle pas de la chaise, mais de sa voiture en panne.
Et Félicie lui dit que si son mari, qui est porté sur l’alcool, ne s’en aperçoit pas, il peut emprunter sa voiture.
Toujours même argument :
Ni vu, ni connu, donc ça arrange tout le monde.
Mais… Deux semaines après, Gaston croise Hippolyte.
Celui-ci le prend par l’épaule et l’emmène boire un verre, puis deux.
Cependant, Félicie, l’épouse, est un peu scrupuleuse, et elle risque de dire à son mari qu’elle que le voisin prend la voiture.
Ce serait une catastrophe pour Hippolyte …
A ce moment-là pourquoi ne pas pousser Gaston dans les escaliers et pourquoi ne pas justifier cela par une loi si on en a la possibilité?
Ou même inscrire la possibilité d’éliminer son voisin, dans la Constitution.
Vous voyez, chers frères et sœurs, où nous mène ce pauvre lépreux…
Ce joyeux lépreux !
Il nous montre que si l’on ne part pas d’un principe moral intangible, une vérité supérieure :
 » je ne tue pas  »
 » je ne vole pas. Je ne fraude pas « .
 » je ne convoite pas la femme de mon voisin »
 » je respecte le jour du Seigneur  »
( c’est-à-dire que ce jour-là, je ne construis pas ma maison, je ne fais pas mes

affaires, mes courses, mais je consacre ce jour à Dieu)
Si je ne pars pas des principes intangibles, je partirais de mon cas particulier, et je me ferais mes lois.
À coups de cas particuliers.
Et je pourrais tout justifier à partir de ce que je juge ‘mon bien’.
Si les lois sont promulguées en fonction de cas particuliers, la culture de mort se répand comme une marée noire.
Car toujours, pour défendre le cas particulier j’arriverai à la mort de mon prochain.
De mon prochain et de ma conscience.
Quand je restreins le bien à ce qui me fait du bien, sans écouter les principes des sommets, je produis du mal, je me fais du mal, visible ou pas, mais je fais du mal à toute la société.
Car inévitablement et je blesse la nature et quelqu’un va payer. Les petits généralement.
Mais cela va plus loin.
Dans la foi, je sais que non seulement j’abîme ma conscience, mais j’abîme mon dessein éternel.
J’abîme de façon infinie le plan d’amour de Dieu sur moi et sur le monde.
Cela veut dire que n’importe quel péché obscur, petit péché inconnu de tous que je fais quand les enfants dorment, réclame justice de la blessure que je fais à l’amour infini de Dieu.
Une loi qui provient de cas particuliers, qui protège ces cas particuliers, est une loi qui contient en elle-même des semences empoisonnées parce que son fondement ne sera pas la vérité, mais un intérêt.
Même si cet intérêt est noble (la santé du lépreux était un noble intérêt pour lui) ou même si cet intérêt est envié de tous.
Pour finir nos actes, nos œuvres, nos devons les suspendre à la vérité qui n’est garantie que par Dieu, par Jésus Christ, par l’Église.
Sinon nous sommes ce lépreux qui est tout content de sa guérison, mais qui perd la grandeur de sa vie. Et qui blesse l’Eglise.
Pour Dieu, toute joie, tout malheur aussi, est une invitation à appeler sa lumière de vérité et d’amour infini.
Plus nos choix et nos œuvres sont ajustés à Jésus Christ, plus ils deviennent intenses et puissants. Et nous porte au-delà de nous-mêmes.
Il nous demandent sacrifice bien sûr, mais ils plongent dans les profondeurs du Saint Esprit… qui couronne nos joies .