« Je pardonnerai leurs fautes,
je ne me rappellerai plus leurs péchés. »
Je ne sais pas si le Seigneur notre Dieu n’a pas fait un petit mensonge dans cette prophétie…
» je pardonnerai leur faute », ça c’est vrai, Dieu a pardonné nos fautes.
C’est le plus extraordinaire de notre foi catholique.
Dieu a été plus loin que la justice.
Il aurait pu s’arrêter à la justice.
Toutes les religions s’arrêtent à la justice.
Et même la religion juive.
Oh, il y a bien dans l’Ancien Testament de nombreux petits sauts de puces qui fait de Dieu un Dieu de miséricorde et de tendresse, mais la bonté de ce Dieu n’avait pas encore ouvert les sources du pardon.
C’est Jésus-Christ qui a dévoilé la profondeur de source infinie d’un amour qui va au-delà de la mort du péché.
Quel est, frères et sœurs, le plus grand péché de votre vie ?
Avez-vous tué quelqu’un ou laissé mourir quelqu’un ?
Avez-vous trahi Dieu en votre cœur, un jour de grand vent ?
Avez-vous cultivé la haine de votre frère, de votre sœur, un mauvais matin, sans que personne ne le voit; ou bien anémié votre âme, sans la nourrir suffisamment, pendant 40 ans ?
C’est inconcevable, mais Dieu vous appelle encore aujourd’hui, et vous ouvre son cœur.
Et non seulement, mais il veut faire briller votre âme par de nouvelles grâces.
Vous savez c’est comme si un ouragan passe dans votre jardin.
Il ne reste plus rien; les arbres sont cassés, la maison a perdu son toit, la clôture laisse passer les chiens errants… le désastre. Vous vous arrachez les cheveux.
Et vous regardez au-dessus de tout cela, et vous voyez que le ciel est bleu, et que le soleil peut encore briller.
Alors, Dieu passe par là.
Et tout le village va remonter votre clôture. (Une journée de travail.)
Et des camions amènent autant d’arbres qu’il y en avait auparavant, prêt à donner leurs fruits. Tout repousse.
Et non seulement cela, mais Dieu rajoute des espèces rares. gratuitement.
En même temps que le toit est reconstruit de tuiles sans défaut, Dieu va refaire la façade et rajouter une ou deux chambres qui manquaient auparavant.
Il va agrandir la maison.
C’est cela l’œuvre du pardon…
Et non seulement ça vous a permis de ne pas arracher tous vos cheveux, mais en plus vous pleurez de joie parce que c’est trop. Trop beau, trop grand.
Bon… « je pardonnerai leur faute » ça c’est vrai. Jésus-Christ l’a fait.. Et puis, il y a … » je ne me rappellerai plus leurs péchés… »
Comment cela ?
N’est-ce pas une figure de style ?
Parce que, enfin ! le Christ, ressuscité, même au Ciel garde les marques des clous dans ses mains, dans ses pieds, dans son côté, les clous de la méchanceté des hommes, de leur imbécillité, de leur aveuglement coupable.
Les vipères de mon cœur.
Alors comment Dieu peut-il oublier ?
Nous sommes 15 jours avant Pâques.
Et je voudrais reprendre une question qui a été soulevée au partage d’évangile, mercredi dernier.
Quelqu’un s’est offusqué du scandale de la croix, de la souffrance du Christ, prévue et presque commanditée par le Père éternel.
Dieu le Père, notre Père, le Père de Jésus-Christ, a voulu la souffrance de son fils comme chemin de Rédemption.
Et ce chemin de rédemption reste toujours valable pour ses disciples et son Eglise. Je voudrais dans cette homélie, ajuster, ou du moins essayer d’ajuster la Passion de Jésus-Christ et le pardon de nos fautes.
Nous allons vivre la semaine prochaine un drame qui dépasse nos forces. « Si le grain de blé ne tombe pas en terre, il ne porte pas de fruits. » Jésus nous donne ici la clé de sa mission rédemptrice.
Toute la vie de Jésus forme un seul acte.
Pour nous, on avance dans la vie par créneaux.
Il y a l’époque où on se fait mal aux genoux, l’époque où on use nos fonds de pantalons sur les chaises de l’école, il y a les crises, les dérapages et les erreurs, il y a les remises en route, il y a l’âge des enfants, des petits-enfants…
Enfin bref, notre vie se déploie par morceaux que l’on comprend ou pas.
Pour Jésus, depuis sa conception, petites cellules dans le ventre de Marie, jusqu’à sa Résurrection et son Ascension auprès du Père, un seul acte, qui se dévoile avec des nuances et des modalités savoureuses ou dramatiques, progressives.
L’acte unique de sauver tous les hommes. De les rendre libres.
Une seule intention divine : vaincre le péché dans lequel les hommes s’enlisaient. Et dans le même élan, ce qui est tout aussi impossible pour les hommes, vaincre la mort.
Pour donner une réponse au scandale, chers frères et sœurs, il faut mettre de côté nos frayeurs de l’horrible souffrance sous tous ses aspects et le dolorisme.
Je prenais un exemple pendant le partage d’évangile.
Un enfant tombe à l’eau, et se débat dans les remous du fleuve.
La première qui s’en aperçoit c’est sa mère.
Que peut-elle faire ?
Elle court vers son mari et dans un cri d’effroi le pousse à l’eau pour qu’il sauve leur enfant.
Il ne pouvait pas le sauver en restant sur la rive, de toute façon, pense-t-elle. Ça va plus vite comme ça, le temps qu’il comprenne !…
Il va se noyer lui aussi, mais qu’importe, c’est le risque à prendre.
Et il va permettre à l’enfant de s’accrocher à un arbre qui va au gré des flots.
Eh bien, nous avons dans cet exemple la Passion du Christ.
Cette mère, c’est le Père, notre Père des Cieux.
Le père de l’enfant, c’est le Fils, Jésus Christ Sauveur.
Et l’enfant, c’est nous…
L’arbre, enfin, c’est la Croix, sur le fleuve boueux de ce pauvre monde bien nul.
La souffrance, l’agonie de Jésus, sa mort, ne sont pas voulues par le Père, directement et en soi.
Ce qui est voulu par Dieu, c’est l’expression de l’amour, sans limite.
« ayant aimé les siens, il les aima jusqu’au bout. »
La souffrance et la mort de Jésus étaient l’expression ‘jusqu’au bout’ de l’amour et du don de soi.
Parce que, pour sauver son enfant, une mère ne met pas de limite. Si elle est normale.
Son but, ce n’est pas de noyer son mari, mais à l’instant où elle voit son enfant boire la tasse elle pousse son mari à l’eau.
Dans ma comparaison, le mari n’est pas très volontaire.
Mais pour Jésus, il a accepté librement le don total de soi, qui passe par la souffrance – grand mystère qui nous aveugle de douleur – pour aller au-delà du fleuve du péché.
Alors évidemment, Dieu, et Lui seul, a des cartes dans son jeu qui sont de beauté infinie.
La carte de l’innocence de Jésus-Christ. Absolument pur et sans péché.
La carte de l’humanité unie à la divinité, dans sa personne.
C’est Jésus.
La carte d’un amour infini.
Un amour de chaque seconde, d’une puissance infinie, et d’une précision divine.
Et puis enfin, la carte de la Résurrection.
Quand Jésus agonisait de la multitude des péchés des hommes, et de nos péchés à nous aujourd’hui, lorsque le grain de blé disparaissait sur la croix, au moment même, Dieu le Père libérait la lumière de la vie éternelle du Ressuscité.
» avec moi aujourd’hui même tu seras au paradis »
Le sacrifice d’amour de Jésus-Christ, vu de notre côté est obstrué par la souffrance. Insupportable.
Mais vu du côté du Père, il est déjà dans l’éblouissement de la Résurrection.
Sur la Croix, Jésus va plus loin que le péché.
Le démon est vaincu.
Et aucun péché ne résistera à cette offrande d’amour.
Par sa Résurrection, Jésus va plus loin que la mort.
Et le démon on reste ahuri d’étonnement.
Jésus l’a dépassé sur tous les fronts.
Et tous ceux qui seront capables d’ouvrir leur cœur à la vie éternelle – tous – seront libérés du péché, de la mort, et des rires moqueurs du démon.
Alors il reste cette dernière question :
‘ Dieu oublie t-il nos péchés ? pourtant inscrits dans le corps crucifié de Jésus…’ Et bien oui en fait !
Parce que les marques de souffrance de Jésus, conservées en son corps ressuscité tel que Jésus les a montrées à Thomas, Dieu les voit comme des marques d’amour de son Fils, comme des marques de victoire.
Parce que, quand on a sauvé quelqu’un, on ne voit plus les efforts que nous avons fait pour le sauver, mais on le regarde comme celui qui nous a fait aller encore plus loin dans l’amour.
Ce qui est étonnant, mais inscrit dans notre nature aussi, c’est qu’on oublie la souffrance de l’amour quand on regarde la Victoire de l’amour.
En Dieu il n’y a que lumière d’amour.
On ne pense pas à la cruelle disparition du grain de blé quand on regarde la blondeur de l’épi de blé sous le soleil.
» Je pardonnerai tes fautes
je ne me rappellerai plus tes péchés. »
Oui, en vérité, quand ton cœur sera illuminé de la grâce et de la vie éternelle.